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le mystère du b 14
du crime… Examen qu’on a oublié de faire,

s’explique… comme je l’avais deviné… L’assassin est bien celui qui a sauté ou voulu sauter dans le Rhône au Robinet… Il signe « Le Poignard de Cristal », et c’est avec ce poignard de cristal qu’il a tué sa victime… Il s’agit de découvrir les traces de ce citoyen-là… Ce ne doit pas être difficile !

Et se tournant vers Lahuche et Frégière :

— Il n’y a pas d’erreur possible, et tout d’ailleurs, soit dit sans vous froisser…

— Mais…

— Je parierais bien un louis que nous allons retrouver la tête, laquelle, plus détachée du tronc que ne l’a cru voir M. le sous-chef de gare, a dû rouler quelque part… Nous allons voir… nous allons voir…

Et il pénétra dans le wagon… M. Chaulvet le suivit.

Alors Rosic se mit à procéder méticuleusement à l’examen du compartiment tout ensanglanté… La couchette était encore rabattue, et un grand désordre y régnait ; somme toute, il n’était pas extraordinaire que la tête ayant roulé, on ne l’eût pas aperçue dans le fouillis de draps, de couvertures, de rideaux et de tapis qui encombraient ce compartiment…

Et voici que tout à coup Rosic, qui furetait sous la couchette, se releva et dit :

— Voilà toujours l’instrument du crime !…

Et il tendit à M. Chaulvet un petit poignard tout souillé de sang, court, acéré, pointu, que M. Chaulvet examina curieusement, puis il dit :

— C’est curieux… Je n’avais jamais vu d’arme pareille ! C’est un poignard de cristal !

— Hein !… s’exclama Rosic… Vous avez dit…

— Regardez vous-même… Il n’y a pas d’erreur… c’est bien un poignard de cristal…

Rosic, nerveux, examina l’arme, petite et fine, comme un bijou, et, comme se parlant à lui-même :

— C’est bien un poignard de cristal… Mais alors…

Et comme un fou, sautant sur le quai et se précipitant vers Frégière, qui faisait part de ses impressions à une demi-douzaine de journalistes assemblés autour de lui et buvant ses paroles :

— Le mot… la carte… ce que vous a laissé l’assassin !

— C’est M. Lahuche…

Mais M. Lahuche, qui avait entendu cette demande, tira son portefeuille de sa poche, et tendant une carte à Rosic :

— Voilà… voilà la carte que Frégière m’a confiée ce matin… Elle appartient, en effet, à la justice !

Mais Rosic n’écoutait pas, il avait pris le bristol, relu cette phrase écrite au crayon :

« Je me souviendrai que vous m’avez sauvé la vie. Signé : Crystal Dagger. »

Et triomphant, agitant sa carte d’une main et la petite arme de l’autre :

— Accompagnez-moi… je vous prie… On va frêter une auto, et en route pour le passage du Robinet !

Il disparut comme un éclair, tandis que le Parquet de Valence demeurait là, éberlué de cette fuite rapide et que Guillenot disait au juge d’instruction :

— Il aura beau faire et beau dire… les traces de pas étaient en contre-voie… et il n’a pas retrouvé la tête, preuve qu’on l’a volée ici ! Il part sur une fausse piste !


vi

le banquier de viviers



Une petite heure après. Rosic, accompagné de Lahuche et Frégière, arrivait en auto à la maisonnette de ce dernier.

Cette maisonnette, plantée tout au bord de la voie, se trouvait exactement à l’entrée de ce défilé que l’on nomme le passage du Robinet.

Elle commandait le passage à niveau d’une route assez fréquentée, qui va de Donzère à Viviers, et traverse le Rhône à dix mètres de la voie sur un pont suspendu à péage.

Mais l’endroit est des plus déserts, et on ne trouve d’habitation qu’à plus d’un kilomètre de là.

D’un coup d’œil, Rosic eut reconnu les lieux ; puis il se fit conduire à l’endroit où Frégière avait découvert « comme un gros merle », ainsi qu’il le disait, le particulier qu’on supposait avoir sauté du B-14 et être l’assassin.

Le bouquet de saules portait encore visible, grâce à ses branches cassées ou froissées, la trace d’un corps qui y serait lourdement tombé :

— Vous voyez, triompha Rosic… c’est