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le mystère du b 14

volontiers je vous abandonne le résultat de cette petite enquête si cela peut vous être utile… Demain, je m’embarque au Havre, dans six ou sept jours je serai à New-York, où je manque depuis trop longtemps. En tout cas… enchanté d’avoir fait votre connaissance… Mais voici Lyon. Je crois que c’est là que vous descendez…

En effet, le train stoppait en gare de Perrache ; les deux hommes se serrèrent la main : T. D. Shap tendit à Rosic sa valise et les deux policiers se séparèrent, Sans doute pour ne plus se revoir…


x

la cruelle surprise de rosic



Dans le fiacre qui l’emmenait chez lui, la précieuse valise sur ses genoux, Rosic nageait dans la joie.

Quelle bienheureuse rencontre il venait de faire de ce T. D. Shap !… Il n’y avait pas à dire, ces détectives américains étaient des malins, et Rosic pouvait bien se l’avouer à lui-même, jamais un policier français n’eût aussi merveilleusement mené cette enquête et débrouillé cet inextricable mystère… Quel esprit de déduction !… Quelle maîtrise !…

Et quel désintéressement, surtout…

Voici que Rosic allait pouvoir éblouir M. Chaulvet, qui, il faut bien le dire, s’était un peu moqué de lui, avec cet air de lui opposer ce petit sous-chef de gare…

L’affaire, à cette heure, lui apparaissait claire comme de l’eau de roche… Demain, quand les journaux raconteraient ce drame dans tous ses détails, le public allait être rudement intéressé… et quelle gloire allait en jaillir sur lui, Rosic…

Il restait bien un point à éclaircir, et c’était de savoir pourquoi ce Joé Wistler avait voulu assassiner Burnt…

Mais tout cela, les papiers de la valise allaient le lui apprendre… Demain matin, Gladys allait lui traduire tout cela…

M. Rosic habitait une gentille et coquette petite villa sur ces coteaux de Sainte-Foy, qui dominent la Saône au moment où elle va perdre ses eaux dans les flots du grand Rhône.

C’était une petite construction en briques rouges, au toit d’ardoise, perdue dans la verdure et d’où la vue était des plus pittoresques.

Veuf de bonne heure, avec une fillette, Edmée, Rosic eut été fort ennuyé quand il avait dû sortir sa fille de pension, s’il n’avait découvert une jeune fille, du nom de Gladys, élevée dans le même pensionnat que la fillette, de quelques années plus âgée qu’elle et qui, se trouvant sans fortune et sans parents, avait consenti à servir de demoiselle de compagnie à la jeune fille.

Mais la demoiselle de compagnie n’avait pas tardé à devenir une véritable amie, mieux même, une grande sœur, et à la vérité Rosic, qui était un excellent homme, aimait cette jeune fille comme si elle eût été véritablement son enfant.

Gladys Sweet était d’origine anglaise ; orpheline, un tuteur quelconque l’avait envoyée en France ; puis ce tuteur était mort, et Gladys s’était trouvée seule au monde, avec quelque douze cents francs de rente, de quoi ne pas mourir de faim ; et elle était fort heureuse et fort reconnaissante d’avoir trouvé presque une famille dans la villa du bon M. Rosic.

Ayant parlé l’anglais jusque vers sa huitième année, époque où elle était venue en France, elle n’avait jamais oublié cette langue qu’elle connaissait aussi bien que le français, qu’elle parlait d’ailleurs sans aucun accent.

Donc, le lendemain matin, car à l’heure où il arrivait chez lui, tout le monde serait couché, Gladys lui traduirait tous ces papiers que contenait la valise, et rien de ce mystère, sans aucun doute, ne lui demeurerait inconnu.

Comme il l’avait supposé, quand il arriva chez lui, tout le monde dormait. Edmée, Gladys, ainsi que la bonne. Rosic paya son cocher, ouvrit sa porte et monta dans sa chambre à coucher, en faisant le moins de bruit possible, afin de ne réveiller personne.

Ayant chaussé ses pantoufles et allumé une bonne pipe, Rosic pensa à voir un peu ce qu’il y avait dans cette fameuse valise… Si les papiers, en anglais, gardaient leur mystère ; du moins pouvait-il trouver quelque objet intéressant et propre à lui fournir quelque nouveau renseignement…

D’ailleurs, il était curieux de vérifier les dires de T. D. Shap, et de voir si véritablement cette valise était bien celle de ce Burnt.

Il ouvrit donc la valise, qui n’était point fermée à clef, et soudain ne put retenir un véritable rugissement de surprise…