Page:Brizeux - Œuvres, Histoires poétiques III-VII, Lemerre.djvu/294

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Où leurs larmes parfois s’épanchent moins amères,
Où ceux qui sont en proie aux fiévreuses chimères
De la gloire naissante et des jeunes amours
Trouvent, non sans douceur, l’oubli des mauvais jours ;
Et, grâce à l’art des vers, là leurs mélancolies
Par des cœurs éprouvés se sentent accueillies.
 
Mais entends-tu gémir les tragiques douleurs ?
L’homme, hélas ! n’est jamais sans un sujet de pleurs.
Nous voici parvenus sur la place publique…
Dans un marais de sang ici la France antique
Disparut ! un roi saint, son épouse, sa sœur,
Un poète au cœur d’or, généreux défenseur,
Et de saints magistrats, et des prêtres sublimes,
Des femmes, des vieillards, et cent mille victimes !
Une pierre a couvert le hideux échafaud,
Mais le sang fume encore, il bout, il parle haut.
Ô sombre tragédie ! ô drame lamentable !
Que nous font désormais les héros de la Fable,
César même et Brutus, le stoïque assassin ?
Là mourait un tyran, ici mourut un saint.
Toute une nation, justement affranchie.
Soudain ivre de sang et folle d’anarchie,
À son brillant passé sans regret dit adieu,
Répudiant ses mœurs, ses grands hommes, son Dieu.
Ceux qui la conduisaient dans sa nouvelle voie
De ses déchaînements les premiers sont la proie
Puis sous le couperet elle traîne en janvier
Celui que tout martyr aurait droit d’envier
Aux mains de trois bourreaux, sur cette horrible place,
On dépouille le Christ devant la populace,
Le doux Capétien, le fils de Saint Louis,