Page:Brizeux - Œuvres, Les Bretons, Lemerre.djvu/212

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Qu’êtes-vous devenus ? Hélas ! dans un couvent
L’enfant pieuse a fui le jeune homme savant ;
Lui, laissant ses cahiers, refermant sa grammaire,
Aux durs travaux des champs s’est remis chez sa mère,
Jusqu’au jour déjà proche où, porteur d’un fusil,
Volontaire soldat il mourra dans l’exil.
Ainsi, fermant tous deux leur âme à l’espérance,
L’une irait au couvent et l’autre irait en France !
Projets sombres, mais vains, si j’en ai bien jugé,
Et si, depuis mon temps, les cœurs n’ont point changé.

Entre Hélène et Lilèz, natures moins subtiles,
Ah ! comme les deux oui se disaient plus faciles !
Mais entre les parents, à l’heure du contrat,
Ce fut des deux côtés un éternel débat :
L’aubergiste du bourg apporta dix bouteilles
Pour amener son monde à des clauses pareilles.
Enfin, chaque opposant par l’autre étant vaincu,
Le notaire put mettre en poche un bel écu.
À quelques jours de là, madame la mercière
Sur son comptoir de chêne étalait toute fière
Ses pièces de drap fin, ses plus riches galons ;
Puis messieurs les tailleurs, assis sur leurs talons,
Mirent en jeu leurs dés, leur fil et leurs aiguilles ;
— À ce noble métier ils valaient bien des filles ! —
Accroupis dans la grange, ainsi, durant un mois,
Ils firent travailler leurs langues et leurs doigts.
 
Les invitations prirent une semaine.
Lilèz et son parrain, Hélène et sa marraine
Allèrent convier, bien vêtus, bien peignés.
Leurs plus proches parents et les plus éloignés :