Page:Brizeux - Œuvres, Les Bretons, Lemerre.djvu/47

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La hache fit tomber ses vieux bosquets de chênes ;
Son brasier s’éteignit ; les blanches Gallicènes,
Pour la dernière fois montant sur le Gador,
Se coupèrent la gorge avec la serpe d’or.
 
Alors, pour recueillir le divin héritage,
Partout formant un cloître, ouvrant un ermitage,
On vous vit dans nos bois accourir par essaims,
Fils de l’Île-de-Miel, fils de l’Île-des-Saints,
Pôl, Malô, Corentin, vous dont nos basiliques
Avec les noms sacrés vénèrent les reliques !
Tout fut soumis au Christ, et, signe triomphant !
La croix sanctifia la pierre du Peûlvan.
 
Mais de ces anciens jours, jours de grande mémoire,
Sans effort revenons à notre simple histoire,
Car le sol a gardé ses antiques débris,
Et l’âme des aïeux anime encor les fils.

Dans le bourg de Carnac, du portail de l’église
Dont les men-hîr brisés ont bâti chaque assise,
Une noce aujourd’hui sort d’un air grave et doux.
Les hommes, les premiers, accompagnent l’époux.
Ce sont des laboureurs, des pêcheurs de la côte.
Et des marins aux traits hàlés, à la voix haute ;
Comme sur leur navire ils marchent en roulant.
Puis, dans le goût de Vanne habillés de drap blanc,
Viennent les invités d’Er-Déven, ceux des îles.
Les gens d’Enn-Tell. Et tous se placent sur deux files,
Afin de voir passer entre ce double rang
La gentille Nona, la fille de Mor-Vran.
Mais Nona dans l’église, à genoux sur la pierre,
S’oubliait et disait prière sur prière.