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NOTICE

succès du Collège de France, invité à se choisir un successeur, avait désigné l’auteur de Marie. Il s’agissait d’un cours de poésie française. Brizeux accepta cette mission avec joie ; il se rendit à Marseille dés les premiers jours de 1814, et ouvrit ses leçons le 20 janvier. Le sujet de ce cours était une théorie générale de la poésie éclairée par maints exemples de l’école nouvelle. V autorité de son nom déjà connu, la protection des vers de Marie, la délicatesse des aperçus littéraires assurèrent bientôt à Brizeux un auditoire d’élite. Il a consacré lui-même ce souvenir, à propos de la rencontre qu’il fit d’un marin breton et de sa femme sur les côtes de Marseille. Il voulut que les murs grecs de Massilie, les troupeaux de chèvres des bassins de Meilhan et ses leçons platoniciennes sur l’art fussent associés aux paysages d’Arzannô. Son cours fini au mois de mai 1834, il s’embarquait pour Civita-Vecchia. L’Italie était devenue la seconde patrie de son âme. La Bretagne lui avait donné l’inspiration première, l’amour des choses simples, le goût des mœurs primitives, le pressentiment d’une merveilleuse harmonie ; l’Italie lui donna la science exquise de l’art. Cette pièce, La Nuit de Noël, qui termine l’idylle bretonne avec tant de grandeur, d’autres qui en complètent les détails, comme Les Batelières de l’Odet, furent publiées par lui dans la Revue des Deux Mondes, après ses voyages de Rome et de Florence. Le premier fruit des leçons qu’il reçut de l’art italien, ce fut donc la troisième édition de Marie ; le second fut le recueil lyrique intitulé Les Ternaires (1841).

Je ne voudrais pas interrompre le tableau du développement de Brizeux ; de Marie aux Ternaires, des Ternaires aux Bretons, des Bretons à Primel et Nola et aux Histoires poétiques, il y a un enchaînement d’inspirations et d’idées que je serais heureux de reproduire ici comme je l’ai vu se dérouler sous mes yeux. Puis-je oublier pourtant, à cette date de 1841, un épisode littéraire qui se rattache encore à son voyage d’Italie ? Quelques mois avant de publier Les Ternaires, Brizeux faisait paraître une excellente traduction de la Divine Comédie. Bien des écrivains, d’un bout de l’Europe à l’autre, se sont exercés sur cette œuvre mystérieuse ; pour ne parler que de la France, M. Antoni Deschamps, dans