Page:Brochet - La Meilleure Part.djvu/26

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j’aime… » ? Yves n’y résista pas, d’autant plus qu’il avait été violemment épris de Gisèle et que toute l’ardeur de son amour lui remontait au cœur, tandis qu’il serrait contre lui cette jolie fille gracieuse et souple. Les cheveux dorés étaient sous ses lèvres, doux comme de la soie, et le parfum de Gisèle se mêlait à celui des fleurs de magnolia, capiteux et grisant…

Ils repartirent comme des amoureux, fiancés plus que jamais. Ils passèrent devant le banc sur lequel Annie était assise tout à l’heure ; mais elle n’y était plus, et Yves, tout à son renouveau de passion, n’eut même pas une pensée pour elle.


VI

— Comment, mademoiselle Annie, vous me quittez ?

— Oui, monsieur Lebonnier, je passe au service de M. Albert Launoy…

— Mais c’est inadmissible ! Je vais faire une réclamation à la direction !

La dactylo, qui réunissait ses affaires pour changer de bureau, leva sur l’ingénieur un regard suppliant.

— Non, s’il vous plaît, n’en faites rien ! C’est moi qui ai demandé ce changement…

Il la fixa, interdit, retrouvant inconsciemment les mots qu’il avait dits autrefois à Gisèle.

— Vous ?… Mais pourquoi ?… Vous n’êtes pas bien ici, avec moi ?

Elle s’efforça de sourire.

— Oh ! si, très bien… Mais il vaut mieux que je m’en aille…

Il n’en put rien tirer de plus ; et d’ailleurs, il craignait de comprendre. C’était après l’histoire du parc Monceau qu’Annie avait demandé son changement. La vue de Gisèle lui avait rappelé cruellement qu’Yves était fiancé, et elle avait bien remarqué le mouvement d’humeur et de jalousie de Gisèle en surprenant Yves avec une jeune fille… Oh ! certes, Annie ne pouvait songer à rivaliser avec le charme éclatant de Gisèle ! Pourtant, celle-ci avait pris ombrage de sa présence, ce n’était pas douteux. Elle avait dû faire une scène à Yves… Annie ne voulait pas que le fait se renouvelât. Elle ne voulait pas être un obstacle, si minime fût-il, au bonheur d’Yves Lebonnier. Et puis n’était-elle pas insensée en restant auprès de lui ? Jour après jour, elle l’aimait davantage et cet amour était sans espoir… Il valait mieux s’éloigner.

Albert, qui héritait de la « perle des dactylos », fut ravi, et Yves dut se contenter d’une secrétaire aux che-