Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/212

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grand-duché contre l’armée de l’amiral Tchitchakoff.

Il y avait néanmoins parmi nous quelqu’un qui en savait probablement plus que nous. C’était un diplomate autrichien, sans qualité officielle, M. Neumann, que beaucoup de personnes ont connu depuis en France et en Angleterre. Il passait à tort ou à raison pour un fils naturel de M. de Metternich. Je ne me rappelle point sous quel prétexte il résidait à Varsovie ; il avait de l’esprit, de l’instruction, de la politesse ; mais nous le soupçonnions d’être plus enclin à rendre compte de nos inquiétudes qu’à les partager.

Enfin, après six semaines de perplexités, dans les premiers jours de décembre, un matin, l’ambassadeur me fit appeler. C’était de très bonne heure. Je le trouvai pâle, défait, consterné. Il me tendit sans mot dire le 29e bulletin de la grande armée ; le fatal bulletin de la Bérézina. Il l’avait reçu dans la nuit. Cette lecture me fit horreur, tout préparé que je fusse au pire, et malgré les réticences visibles pour l’œil le moins exercé ; l’ambassadeur me prescrivit de porter sur-le-champ cette triste communication à M. Otto, notre ambassadeur à Vienne. La mission n’était