Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/33

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honorablement subsister, imaginèrent de nous conduire à Vesoul, et de nous recommander à la charité du représentant du peuple en mission c’était, je crois, Robespierre le jeune. On m’affubla du costume à la mode ; on me mit sur la tête un bonnet rouge et des sabots aux pieds ; dans cet équipage, nous fîmes antichambre pendant près d’une heure, avant d’être admis devant notre futur bienfaiteur ; il nous reçut assez bien, et nous donna, pour vivre, sur les biens de ma mère qui étaient séquestrés, une provision de dix mille francs en assignats. Je ne sais pas au juste quelle était alors la valeur de ce chiffon.

Le 9 thermidor ouvrit les prisons, hélas trop tard pour mon père, et rappela les fugitifs dans leurs foyers. Ma mère rentra en France ; le séquestre fut levé sur Saint-Remy et sur ses biens d’Alsace, par les soins de M. d’Argenson, qui devint pour nous un second père.

Bientôt après, je partis avec lui pour Paris ; nous y précédâmes ma mère et mes sœurs.

J’étais dans cet atelier de révolution le jour même du 13 vendémiaire. Nous demeurions rue de la Chaise, en face de l’hôtel de Croix actuel. L’événement ne me parut pas avoir beaucoup de