qui avait subi la persécution, l’expatriation, la confiscation pour ces ingrats, n’avait plus qu’à secouer la poussière de ses pieds en s’éloignant et à s’envelopper la tête dans son manteau.
Je trouvais son indignation naturelle et son ressentiment légitime ; mais il me semblait que l’expression en était tout à la fois excessive et déplacée dans un pays étranger à l’Allemagne et surtout devant des Français qui pouvaient bien sans trop de malice être tentés de se réjouir des mécomptes de leurs vainqueurs.
Tout autre était le général Laharpe.
Retiré désormais du monde et des affaires, au sein de sa famille, à Lausanne, dans ce canton de Vaud dont il pouvait à bon droit se dire le libérateur, il y coulait ses derniers jours dans un repos plein de gravité et de dignité. Sa très petite maison, simple à l’extérieur, modeste au dedans, dominait d’un coup d’œil tout le théâtre des luttes de sa jeunesse, des succès et des revers de son âge mûr, tout le riant et magnifique bassin du Léman. Son large front couvert de cheveux blancs couronnait, en quelque sorte, les traits de son mâle visage. Ses yeux surmontés d’épais sourcils lançaient au besoin des flammes ; sa vieille stature était restée énergique