Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/378

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et robuste. Il racontait volontiers, sans détours et sans regret, la révolution helvétique, la part qu’il y avait prise, les violences auxquelles il avait prêté de grand cœur son nom et son bras. Il s’exprimait avec un dédain respectueux sur les souverains, les princes, les personnages dont le cours des événements et les aventures de sa vie l’avaient rapproché mais il ne parlait qu’avec enthousiasme et les larmes aux yeux des anciens fondateurs de la liberté helvétique, oubliant que cette liberté avait précisément pris naissance dans ces petits cantons qu’il avait lui-même opprimés et dévastés au nom de l’unité directoriale.

Ces réflexions ne m’échappaient pas ; mais je ne pouvais néanmoins l’entendre sans émotion. J’allai plus d’une fois le visiter dans sa retraite. J’y étais surtout attiré par le séjour à Lausanne de mes deux amis du Censeur, qui, chassés de France, y avaient trouvé un refuge, mais un refuge passager ; la protection du général Laharpe ne put les y maintenir. Ils furent forcés de se retirer en Angleterre.

Je ne dirai, en ce moment, qu’un mot de M. Rossi.

À peine âgé de vingt-cinq ans, il était l’honneur et la lumière du barreau de Bologne, lors de la