Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/250

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Hindley désirait un peu d’eau ; je lui ai tendu un verre et lui ai demandé comment il allait.

— Pas aussi mal que je le voudrais, a-t-il répondu. Mais, sans parler de mon bras, chaque parcelle de mon corps est aussi endolorie que si j’avais lutté avec une légion de diablotins.

— Oui, ce n’est pas étonnant, ai-je remarqué. Catherine se vantait de s’interposer entre vous et la douleur physique : elle voulait dire que certaines personnes ne vous toucheraient pas de crainte de l’offenser. Il est heureux que les morts ne se lèvent pas réellement de leurs tombeaux, car autrement, la nuit dernière, elle aurait pu assister à une scène répugnante. N’êtes-vous pas meurtri et blessé à la poitrine et aux épaules ?

— Je n’en sais rien ; mais que voulez-vous dire ? A-t-il osé me frapper quand j’étais à terre ?

— Il vous a accablé de coups de pied et vous a cogné contre le sol, dis-je à voix basse. Son envie de vous déchirer avec ses dents était telle que l’eau lui en venait à la bouche. Car il n’est homme qu’à demi… même pas, et le reste est démon.

Mr Earnshaw a levé les yeux, comme moi, vers le visage de notre ennemi commun. Absorbé dans son angoisse, celui-ci paraissait insensible à tout ce qui se passait autour de lui ; plus longtemps il restait dans cette attitude et plus la noirceur de ses méditation se révélait sur ses traits.

— Oh ! si Dieu voulait seulement me donner la force de l’étrangler dans ma suprême agonie, j’irais en enfer avec joie, gémissait son impatiente victime, qui se débattait pour essayer de se lever et retombait désespérée, convaincue de son impuissance à lutter.

— Non, c’est assez qu’il ait tué l’un de vous, ai-je observé