dénouer les cordons de sa chaussure ou de porter son parapluie de coton, passaient à ses yeux, dans son sincère enthousiasme, pour de jeunes saints. Peu importait qu’on lui fît remarquer clairement leurs petits vices et leurs énormes absurdités, elle ne les pouvait voir : elle était aveugle pour les défauts ecclésiastiques. Le blanc surplis pouvait couvrir une multitude d’imperfections.
Shirley, connaissant cette innocente infatuation de la part de celle qu’elle venait de choisir pour son premier ministre, stipula expressément que les vicaires n’auraient pas voix délibérative pour l’emploi de l’argent. Les recteurs devaient avoir la haute main, et l’on pouvait se fier à eux ; ils avaient quelque expérience, quelque sagacité, et M. Hall, au moins, avait de la sympathie et une bienveillance dévouée pour ses paroissiens ; mais quant aux jeunes gens sous leurs ordres, il fallait les tenir à l’écart et leur apprendre que la subordination et le silence étaient ce qui convenait le mieux à leur âge et à leur capacité.
Ce fut avec une espèce d’horreur que miss Ainley entendit un pareil langage. Caroline, cependant, la calma en prononçant quelques mots à la louange de M. Sweeting. Sweeting était le favori de miss Ainley ; elle s’efforçait de respecter MM. Malone et Donne ; mais les tranches de pâtisserie et les verres de vin de primevère qu’elle avait offerts à Sweeting, toutes les fois qu’il était venu la visiter dans son petit cottage, étaient toujours donnés avec une attention et des sentiments tout maternels. Elle avait une fois offert la même frugale collation à Malone ; mais ce personnage avait affecté pour son offre un si évident mépris, qu’elle ne s’était jamais aventurée à la renouveler. Elle servait souvent aussi ce régal à Donne, et se trouvait heureuse de lui voir manifester son approbation d’une manière évidente en mangeant deux tranches de gâteau, et en en mettant une troisième dans sa poche.
Infatigable quand il s’agissait de faire le bien, miss Ainley se fût aussitôt mise en route et eût entrepris une tournée de dix milles pour voir les trois recteurs, leur soumettre le plan et solliciter leur approbation ; mais miss Keeldar lui interdit cette démarche, et proposa, comme amendement, de réunir le clergé en petit comité le soir même à Fieldhead. Miss Ainley y assisterait, et le plan serait discuté en conseil privé.
Shirley fit donc appeler à Fieldhead MM. les recteurs, et, avant l’arrivée de miss Ainley, elle soutint la conversation