réussis dans ce que j’ai l’intention de faire, mon succès ajoutera à son revenu et à celui de Shirley : je puis doubler la valeur de leur propriété ; je puis couvrir le stérile Hollow de rangées de cottages et de jardins.
— Robert !… vous défricheriez les taillis !
— Le taillis sera du bois à brûler avant que cinq ans se soient écoulés ; la belle et sauvage ravine sera une douce descente ; la verte terrasse naturelle sera une rue pavée ; il y aura des cottages dans la sombre ravine et des cottages sur la pente stérile ; le dur sentier hérissé de cailloux sera une route unie, ferme, large et noire, formée avec les cendres de ma fabrique ; et ma fabrique, Caroline, ma fabrique remplira toute la cour actuelle.
— C’est horrible ! vous voulez changer l’air bleu et pur de la campagne pour l’atmosphère fumeuse de Stilbro’.
— Je veux répandre les eaux du Pactole à travers la vallée de Briarfield.
— J’aime mille fois mieux le ruisseau.
— J’obtiendrai une loi pour enclore le communal de Nunnely et le diviser en fermes.
— Le marais de Stilbro’ vous défie, cependant, grâce au ciel ! Que pourrez-vous faire venir sur la mousse de Bilberry ? Qu’est-ce qui fleurira sur Rushedge ?
— Caroline, les ouvriers sans asile, sans pain, sans travail, viendront de loin à la fabrique de Hallow ; Joe Scott leur donnera de l’ouvrage, Louis Moore leur louera une maison, et mistress Gill pourvoira à leurs besoins jusqu’au premier jour de paye. »
Caroline sourit avec bonheur.
« Quelle école du dimanche vous allez avoir, Cary ! Quelles assemblées vous allez réunir ! Quelles écoles de chaque jour vous, Shirley et miss Ainley, aurez à gouverner, à surveiller ! La fabrique trouvera des salaires pour un maître et une maîtresse, et le squire et le drapier donneront un festin quatre fois par an. »
Elle lui offrit un baiser muet, baiser dont il prit avantage pour lui en extorquer cent autres.
« Rêves extravagants ! dit Moore avec un soupir et un sourire ; peut-être cependant en pourrons-nous réaliser quelques-uns. Mais, la rosée tombe : mistress Moore, prenez mon bras, nous allons rentrer. »