Page:Bruneau - Musiques d’hier et de demain, 1900.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
135
LE VAISSEAU FANTÔME

est à côté du navire hollandais, silencieux, enveloppé de nuit fantastique. Le jeune équipage, qui danse et s’amuse, raille et défie les vieux marins invisibles. Mais ceux-ci, comme des spectres, apparaissent sur le pont du vaisseau fantôme qu’agite une soudaine tempête et tout le monde fuit devant eux. Cependant, voici Senta avec Erick, son fiancé, qui lui rappelle les anciens jours. Et l’amertume des souvenirs l’émeut et elle donne une fois encore sa main à celui qui devait être l’époux. « En mer ! Les voiles au vent, l’ancre au navire ! En mer pour toujours, puisqu’il n’est plus de fidélité, hurle le maudit qui épiait, et, pour toujours, adieu à la terre ! » Et les toiles rouges se déploient dans l’ouragan et le vaisseau fantôme s’éloigne. Mais Senta a gagné le rocher qui s’avance au-dessus des flots, et, enfin rédemptrice, elle se précipite dans l’abîme, tandis que le bateau errant y disparaît. Au fond, s’élèvent, des eaux calmées, l’Homme et la Femme que transfigure l’éblouissante lumière du salut glorieux.

Tel est ce drame, superbe par le poème, inégal par la musique, débordant de vie, de mouvement et d’humanité, drame de grandeur simple, de mansuétude sereine et de style impersonnel. A-t-on eu raison de le représenter et d’ajouter un ouvrage au répertoire wagnérien de nos