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Page:Bruneau - Musiques d’hier et de demain, 1900.djvu/168

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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

un rang de chef d’école parfaitement illusoire d’ailleurs, car au pays de la pensée humaine, il n’y a ni écoles ni chefs et, en admettant même qu’il y en eût, il faudrait que ces chefs d’école fussent, avant tout, des novateurs.

Novateur, je ne sais si M. d’Indy le sera jamais. Il ne l’est pas encore. Le jour est proche où les musiques et les pièces wagnériennes — j’entends imitées de Wagner — deviendront impossibles, à cause de leur fréquence et du triomphe même de leurs modèles ; à cause aussi de l’évolution incessante du snobisme. Chacun a le droit de suivre en sa course glorieuse vers l’au delà le prodigieux poète allemand et d’adopter le plan de réformes qu’il a si magnifiquement tracé, mais à la condition expresse d’ouvrir des routes sur son propre sol, d’appliquer au génie national les idées en marche, de créer en un mot, d’avancer, d’avancer toujours, guidé par la jeune inspiration qui jaillit des sources intarissables de la race. C’est reculer que d’agir autrement et c’est ce que ne veulent pas comprendre tant de bons ouvriers d’art hypnotisés par la splendeur de l’œuvre sublime et le succès trop tardif qui l’accueille. Oui, trop tardif de toutes façons, car ce succès qui, par la simple justice, était dû, il y a des années et des années, à la souveraine grandeur de l’effort