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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

on va le voir. D’abord, au XIIIe siècle, le trouvère Adam de la Halle, s’inspirant de la mélodie populaire, écrit le Jeu de Robin et de Marion, que l’on doit considérer comme la manifestation initiale. Quatre cents ans plus tard, sur les tréteaux de la foire Saint-Germain, de la foire Saint-Laurent, des parodies sont essayées, celle d’Alceste, celle de Télémaque, où il n’entre encore, à proprement parler, aucun élément créateur ; puis des vaudevilles sont donnés, guère plus originaux, étant faits avec les « timbres » du temps, et enfin paraît la Chercheuse d’esprit de Favart, pastorale d’extrême naïveté qui est vraiment le premier opéra-comique.

Aux efforts des bouffons italiens, installés à l’hôtel de Bourgogne et qui avaient naturellement apporté à Paris la charmante Serva Padrona de Pergolèse, nos chanteurs, leurs associés, opposent tout de suite, avec un prodigieux succès, le Déserteur, de Sedaine et Monsigny. Quel pas immense et quelle brusque, quelle capitale transformation ! Un drame lyrique, poignant, humain, « éminemment français » par le livret et la partition, élargissant, d’un coup, le cadre jusqu’alors si petit, si frêle et marquant le durable triomphe de notre musique, déjà combattue âprement par la musique étrangère, triomphe assez beau, assez décisif pour provo-