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Page:Bruneau - Musiques d’hier et de demain, 1900.djvu/260

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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

de tous les drames de Wagner, le drame de Tristan et Iseult est à la fois le plus humain, le plus poignant et le plus simple. Je sais bien que les commentateurs y ont trouvé assez de choses pour en faire une œuvre purement métaphysique ou symbolique, violemment systématique quant à la partition, antithéâtrale essentiellement, si abstraite, obscure et fermée que cinquante volumes semblent insuffisants à en expliquer les énigmes : je sais bien que Wagner, au moment où il a composé Tristan, subissait l’influence de Shopenhauer et ne s’en cachait pas, que dans sa lettre à M. Frédéric Villot, où est exposée toute la théorie du drame lyrique, de l’union de la poésie et de la musique, théorie trop connue maintenant pour que j’aie à l’étudier ici, il a dit s’être « plongé avec une entière confiance dans les profondeurs de l’âme, de ses mystères, et de ce centre intime du monde, avoir vu s’épanouir sa forme extérieure ». Mais je sais bien aussi que la dernière partie de cette phrase est à retenir, qu’il y a, en effet, dans Tristan et Iseult, provoquée par un secret combat d’âmes, une lutte extérieure dont il nous est facile de suivre les péripéties et je sais bien encore que, dans cette même lettre à M. Frédéric Villot, Richard Wagner a écrit, à propos de l’ouvrage en question : « Ici, je me mouvais avec la plus entière liberté, la