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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

au lieu de les rappeler simplement comme dans les œuvres précédentes. — Tristan date de 1859 et, chronologiquement, suit Lohengrin. — C’est le chant de désir qui commence, qui déchaînera la tempête d’amour des trois actes et s’achèvera en la scène extatique de la mort d’Iseult, conclusion pareille à celle de la légende celtique où Richard Wagner a puisé les éléments constitutifs de son œuvre, légende qui, après avoir ému de longues générations d’hommes, s’être effacée des souvenirs, renaît aujourd’hui, magnifiée par la puissance souveraine de la musique.

De caractère naïvement, mélancoliquement populaire, venu en droite ligne du roman inspirateur, est le lied expressif que dit, au début, sans aucun accompagnement, le matelot monté dans la mâture du navire qui emporte en Cornouailles le couple prédestiné. Passant dans l’orchestre, sous deux formes distinctes, ce lied montre le pittoresque de la traversée et indique la révolte d’Iseult, princesse d’Irlande, que le chevalier Tristan amène au roi Marke, son oncle, en exécution du pacte réconciliateur. Un trait tordu des instruments à cordes accentue la violence de cette première scène, qui nous fait pressentir le mystère d’amour, mystère fatal marqué par les froides et sinistres har-