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DE PHILIPPE

obscure. La fenêtre était ouverte, c’était l’été. Il y avait clair de lune, mais un arbre touffu interceptait la lumière, dont un seul rai mince pénétrait jusqu’à la petite toilette. Cette nuit était fraîche, ou plutôt c’était le petit matin. Philippe entendait dans le silence le bruit des bouteilles que trimbalaient les laitiers. Il re­ferma les yeux, essayant de rejoindre un rêve vague, dont traînaient encore les lambeaux. Philippe respirait sans doute d’un souffle fort régulier, puisque, tout à coup, il se sentit pres­ser par des bras chauds : on le croyait endormi. Cela dura quelques instants, puis, plus rien. La fille, elle aussi, sortait d’un rêve, et, un court instant, par procuration, s’abandonnait à une tendresse dérobée. Philippe n’eut pas la force de trouver cette sensibilité peureuse et timide. Jamais pourtant il ne sentit avec plus de précision la solitude des corps humains qui vou­draient se rencontrer.

Le matin, ils étaient autres, et rien n’y pa­raissait.

Chez Claire, le matin, Philippe se leva donc penaud. Un moment, croyant tout perdu, il eut velléité de partir sans lui parler. Philippe se mit plutôt à boire. D’autant qu’il pleuvait et que les arbres se tordaient sous la rafale. Leur maison était fort isolée, et cette tempête, ce vent augmentaient la solitude. Les boiseries cra­quaient. C’était le mois d’août et pourtant déjà un froid d’automne. Philippe s’avisa d’allumer