tout en Provence comme en Bretagne, ou à Besançon comme à Caen. Le régime de vie a aussi son influence, la qualité de la nourriture et la nature de la boisson, bière ou vin, schiedam ou whisky : nous en convenons sans difficulté. Mais, en fait, il ne paraît pas « nécessaire » que la douloureuse aventure d’Eugénie Grandet se soit déroulée à Saumur, ou celle de Balthasar Claës à Douai, plutôt qu’à Nérac, par exemple, ou qu’à Villeneuve-d’Agen. Au surplus, ce ne sont là que des questions, ou, si je puis ainsi dire, que des chicanes d’ « espèces », qui ne retranchent rien de la valeur intrinsèque des descriptions. Qu’elles expliquent ou non, et, dans le sens philosophique du mot, qu’elles « déterminent » ou qu’elles ne « déterminent » pas les personnages du romancier, les descriptions de Balzac sont ce qu’elles sont ; et, si rien, à sa date, n’a été plus neuf que cette introduction de la « géographie de la France » dans le roman, on doit dire aujourd’hui que, dans cet art de mêler le passé local au présent, et de les fixer ensemble dans une inoubliable image, Balzac, depuis un demi-siècle, n’a pas été surpassé.
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