Page:Brunetière - Honoré de Balzac, 1906.djvu/196

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restriction perpétuelle de ce paradoxe, et si le romantisme en était la contradiction, le roman de Balzac en était la démonstration. Commencée par le Curé de Tours [1832] et par Eugénie Grandet [1833], la démonstration s’était poursuivie, d’année en année, avec la Recherche de l’Absolu [1834], le Père Goriot [1834], le Contrat de mariage [1835], la vieille Fille [1836], César Birotteau [1837], le Curé de Village [1839], Une ténébreuse Affaire [1841], autant de récits dont on pourrait dire, — avec un peu d’exagération, pour se mieux faire entendre, et à l’exception toutefois du dernier, — que l’intrigue est à peu près nulle, et qui valent, nous l’avons déjà dit, non point en dépit, mais à cause de cette nullité même ! Ce n’était là rien de moins qu’un déplacement de l’idéal d’art qui avait jusqu’alors été celui du romantisme. Rien ne s’était vu de plus considérable, depuis l’époque où Molière et Racine avaient opéré, au cœur du classicisme, la révolution qui l’avait transformé jadis, vers 1660, en un « naturalisme » uniquement tempéré par les convenances mondaines. Et, — coïncidence assez remarquable ! — c’était, dans l’un et dans l’autre cas, le même moyen