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Page:Brunetière - Questions de critique, 1897.djvu/19

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SUR UN BUSTE DE RABELAIS

vous que le quatrième n’a paru qu’en 1552, c’est-à-dire un an peut-être à peine avant la mort de son auteur ; considérez ce qui se disait, ce qui s’écrivait, ce qui s’imprimait autour de lui ; et vous reconnaîtrez que, fidèle à son personnage, il n’a point passé la limite, qu’il n’a rien dit de plus audacieux que ses contemporains ; — et qu’il n’a enfin de supériorité sur eux que celle de l’abondance et de l’éclat de son imagination, de l’énormité de sa verve bouffonne, et de la force, de la puissance, de l’éloquence, de la perpétuelle invention de son style.

Il est vrai qu’il y a le quatrième et le cinquième livres : les Papefigues et les Papimanes, les Uranopètes Décrétales, l’Ile sonnante, Grippeminaud et les Chats fourrés. Mais j’avais l’occasion, tout récemment, de le dire en un tout autre sujet : c’est une question discutable et très controversée, que de savoir si le cinquième livre est de Rabelais. Car, tout d’abord, le fait est qu’il ne fut publié qu’environ dix ou douze ans après la mort de l’auteur, et que plusieurs de ses contemporains en ont nié l’authenticité. Ce qui est également certain, et en admettant que l’idée lui en appartienne, l’exécution n’en saurait être de la main de Rabelais, s’il est mort en 1553, puisqu’en effet plusieurs passages ne peuvent avoir été écrits qu’après sa mort, et l’un d’eux seulement en 1558. On remarquera que je ne dis rien de la diversité des styles : tout le monde sait que, si l’on entrait une fois dans cette voie, il n’y a pas un de nos grands