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Page:Brunot - Histoire de la langue française, des origines à 1900 — Tome 7.pdf/160

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mes études, lorsque ce changement arriva (entroit > entrét, François > Francéz) et que nos Maîtres nous exhortoient à nous roidir contre, et à retenir l’ancienne prononciation » (p. ix). Il y avait donc dans l’école que fréquentait l’auteur des lectures, tout au moins des conversations en français, et on s’y attachait à prononcer correctement, ce qui indique un certain raffinement.

Les frères des Écoles chrétiennes paraissent mériter sur ce point tomme sur tant d’autres de grands éloges. Ils considèrent qu’une bonne prononciation n’est point chose méprisable. Diverses prescriptions de la Conduite des Ecoles sont à retenir[1] : Il faudra que le maître sache parfaitement le petit traité de prononciation… On exercera les élèves à toutes les règles de la prononciation française, à la manière de bien prononcer les syllabes et les mots et à faire sonner les consonnes à la fin des mots quand le mot suivant commence par une voyelle.

Le maître enseignera ces choses aux écoliers quand ceux-ci liront. Il leur fera remarquer toutes les fautes qu’ils commettent contre la prononciation, en les reprenant exactement et sans en laisser passer aucune[2].

Les Frères, qui ne recrutaient pas sur place les maîtres qu’ils affectaient à leurs 116 maisons, avaient eu l’occasion de noter les accents provinciaux, de les confronter, et l’idée de les corriger chez ces maîtres, et, s’il se pouvait, chez leurs élèves, devait leur venir. Les parents, dans certains endroits, y tenaient peut-être. On peut le soupçonner d’après les termes employés par quelques-uns de ceux qui offraient leurs services et posaient leur candidature dans les paroisses, nous l’avons vu. Ce n’était pourtant pas un mince mérite que d’apercevoir l’intérêt que présentait une lecture correcte. Et les Frères, autour de 1789, étaient au nombre d’au moins mille.

Le vice essentiel de pratiques usuelles. La lecture en latin. — J’ai parlé au tome V (p. 39) de la détestable routine, qui persistait, de commencer par apprendre à lire en latin. Les historiens de l’enseignement, même les plus indulgents pour l’école de l’Ancien Régime, n’ont pas pu cacher cette erreur[3].

  1. Dans le traité de Civilité du Vble de la Salle, il y a un chapitre, le IXe, qui traite du parler et de la prononciation.
  2. Cond. des Ecoles, 35, dans [Le F. Lucard] Vie du Vble J.-B. de la Salle, Rouen, Fleury, 1874, 344.
  3. « L’enfant, dit Babeau, apprenait ses lettres dans un alphabet, dit Croix de Jésus, ou Croix de par Dieu.

    À la suite de l’Alphabet se trouvaient les prières en latin ; c’est dans cette langue que, d’après un usage immémorial, l’enfant commençait d’ordinaire à épeler. Il se servait aussi pour l’épellation de deux livrets connus l’un sous le nom de petit latin on lou-