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t-on dans le secondaire et le supérieur ? Ce qui est tolérable ailleurs devient ici à peu près impossible. Il paraîtra inadmissible aux administrations, aux maisons de commerce elles-mêmes d’accepter dans les fonctions et les emplois des gens incapables de reproduire l’orthographe des imprimés ou au moins de s’en approcher. Beaucoup de jeunes gens voudront donc, de leur propre gré, connaître et posséder cette forme. Où l’apprendront-ils ? Quand ? À 13, 14 ou 15 ans, cela leur sera à peu près impossible.

Qui ne voit la conséquence ? C’est que, les préjugés héréditaires aidant, l’orthographe étant redevenue la chose de quelques-uns, elle retrouvera plus d’estime que jamais dans un certain monde. De même qu’en Angleterre un gentleman se fait reconnaître à la première phrase qu’il prononce, de même, il y aura des gens qui se classeront dès la première ligne comme des hommes supérieurs, on aura fait une classe nouvelle, celle des gens qui sauront écrire : le mandarinat.

Je ne conclus pas de ce qui précède qu’une réforme pédagogique qui diminuerait l’importance donnée à l’orthographe dans l’école serait mauvaise, mais je crois fermement qu’on ne peut pas supprimer tout enseignement orthographique.

Cela est chimérique et dangereux. Dès lors, comment restreindre l’importance de cet enseignement ? Est-il suffisant de diminuer purement et simplement les coefficients dans les examens, de décréter l’indulgence ? Une semblable mesure est désirable sans doute. Elle ne sera vraiment juste et vraiment sans danger, que si on