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discerne entre les fautes. J’avoue que j’accepte avec peine qu’on confonde je serai et je serais, j’eusse fait et j’eus fait. J’ai trouvé cette erreur dans 15 versions latines environ sur 26 qui m’étaient données à corriger au baccalauréat. Je la juge énorme. C’est confondre l’usage même des temps et des modes, c’est pécher gravement contre la langue même. Il faut tâcher d’empêcher cela autant qu’on le peut. Écrire au contraire deux cents onze comme deux cents, c’est montrer qu’on a de la raison et de la logique, et il serait juste que la note donnée le prouvât. S’il s’agit des mots, même observation. Il y a erreur véritable à orthographier une plainthe ; il est méritoire de ramener sablonneux à l’analogie de limoneux, baronnie à félonie, grelotter à sangloter.

Mais alors ; s’il y a des fautes vénielles et même louables, quelles sont-elles ? Est-ce le libre jugement des maîtres ou des examinateurs qui les distinguera ; et qui ne voit qu’en pareil cas les candidats sont exposés aux inégalités et à toutes sortes d’injustices ? Ce qui sera vrai à Nancy n’aura guère de chance de l’être encore à Lunéville. C’est inacceptable.

Déjà pour l’orthographe de règles, des listes ont été dressées. Il est absolument nécessaire qu’il en soit de même pour l’orthographe de mots.

Nous arrivons donc à cette première conclusion. Il faut que le Ministre de l’Instruction publique, qui aura à s’entendre à ce sujet avec les autres départements intéressés, comme les Postes, détermine les fautes qui ne sont plus des fautes, et élimine dès lors de l’enseignement tout ce qui les concerne.