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de ceux, par exemple, qui ont occupé pendant la période tertiaire tout le nord de l’Europe et de l’Amérique et dont nous aurons ultérieurement à parler.

Les rivières et les fleuves des régions septentrionales charrient comme la mer des masses de glace de grandes dimensions, dans lesquels sont fréquemment enchâssés des blocs erratiques. Ces blocs, entraînés vers la mer par le courant des fleuves, peuvent flotter à sa surface pendant un laps de temps encore fort long et être transportés à de grandes distances de l’embouchure du fleuve d’où ils viennent. La côte du Salvador, entre le 50e et le 60e degré de latitude, est remarquable par la grande quantité de blocs erratiques qu’elle présente.

Les blocs de pierre ainsi transportés par la glace ne viennent pas toujours des rives des fleuves. Souvent ils y ont été apportés par des glaciers ; d’autrefois ils viennent du fond même des torrents ou des rivières. Lorsque l’eau se congèle jusqu’au fond du lit de la rivière, elle enchâsse les roches qui fond saillie ; plus tard, quand la fonte commence à se faire, quand la glace se divise en blocs, ces derniers tendent, en vertu de leur moindre densité, à gagner la surface du fleuve ; alors, ils arrachent et soulèvent les pierres enchâssées dans leur masse.

Un phénomène analogue a été observé dans la Baltique. Des pierres fort grosses y sont fréquemment prises par les glaces dans le fond de la mer et transportées plus ou moins loin.

Eau décomposée dans le sol. Il ne faudrait pas croire que toute l’eau des pluies soit transportée vers la mer par les ruisseaux, les torrents, les rivières et les fleuves. C’est à tort que Buffon, dans le passage cité plus haut[1], écrit : « La mer reçoit autant d’eau par ses bords qu’elle en perd par l’évaporation. » Il est, au contraire, bien certain qu’une partie de l’eau qui tombe sur le sol sous forme de pluie et qui provient de la vapeur d’eau enlevée par le soleil à la mer et aux fleuves ne revient jamais ni à la mer ni aux fleuves.

Une partie de l’eau des pluies ne fait, pour ainsi dire, que laver la surface du sol, et se rend tout de suite dans les cours d’eau voisins. Une autre partie beaucoup plus importante pénètre dans le sol par des fissures et des fentes, ou en filtrant à travers les roches, et ne reparaît à la surface qu’après s’être chargée de matières empruntées aux roches souterraines. Enfin, il est permis de croire qu’une troisième portion de l’eau tombée sur le sol à l’état de pluie est décomposée dans le sol et ne reparaît plus à la surface sous sa forme primitive.

Pénétration de l’eau dans le sol. Nous venons de dire que l’eau des pluies pénètre dans les profondeurs du sol soit par des pentes et des fissures, soit par filtration. Les fentes et les fissures destinées à lui donner passage sont extrêmement nombreuses. Tout

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