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prétendus animaux ne sont que les parties organiques vivantes dont nous avons parlé, qui sont communes aux animaux et aux végétaux, ou, tout au plus, ils ne sont que la première réunion de ces parties organiques. »

La seule différence donc qui existe, d’après Buffon, entre la reproduction asexuée et la reproduction sexuée, c’est que dans la première les « parties organiques » inutiles à l’accroissement, venues « de toutes les parties du corps», forment directement, par leur réunion, le rudiment de l’organisme nouveau, tandis que, dans les animaux à reproduction sexuée, elles se réunissent dans les organes génitaux de chacun des sexes pour former une liqueur séminale et des spermatozoïdes, incapables de reproduire l’animal s’ils restent isolés, mais capables de former un animal nouveau s’ils sont réunis ; le jeune sera mâle si ce sont les particules organiques fournies par le mâle qui dominent ; il sera femelle si, au contraire, les particules organiques fournies par la femelle sont plus abondantes.

Si singulière que puisse paraître cette thèse, elle n’est pas morte avec Buffon qui, du reste, l’avait empruntée en partie aux anciens ; elle a revu le jour, sous une forme très peu différente, à une époque toute récente, sous le patronage d’un homme dont le nom jouit d’une grande popularité, Charles Darwin.

Avant d’examiner l’évolution scientifique des questions que je viens de traiter, il me paraît nécessaire de résumer les idées de Buffon ; le lecteur saisira ainsi plus facilement la part qui revient à l’illustre naturaliste dans l’histoire de cette partie de la science.

Résumé des idées de Buffon sur l’origine et la multiplication des êtres vivants. Buffon pense que certaines parties de la matière inorganique se sont transformées en « particules » ou « molécules organiques » désormais indestructibles, destinées à produire par leur mélange avec la matière inorganique le corps des animaux et des végétaux, se séparant de la matière inorganique après la mort des organismes dont elles ont fait partie, et se réunissant plus tard pour former de nouveaux organismes. Il admet formellement non seulement la génération spontanée des premiers êtres vivants, mais encore la génération spontanée actuelle d’un très grand nombre d’organismes inférieurs. Les animaux et les végétaux se nourrissent par la pénétration et l’intussusception dans toutes les parties de leur organisme des molécules organiques contenues dans les aliments. Tant que l’animal croît, les molécules organiques qui lui sont fournies par les aliments sont entièrement utilisées pour le développement ; quand il a atteint le maximum de son accroissement, les molécules organiques alimentaires qui ne sont pas employées à la croissance se rendent de tous les points du corps dans des régions déterminées où elles forment, par leur union, tantôt des parties virtuellement « semblables au tout », capables de reproduire l’animal ou le végétal dès qu’elles en sont séparées et mises en état de se nourrir, tantôt des liquides et des corpuscules solides, mâles et femelles, dont le mélange est nécessaire pour former un organisme nouveau.