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nos comètes[NdÉ 1]. Nous et nos neveux n’en dirons pas davantage jusqu’à ce que, par des observations ultérieures, on parvienne à reconnaître quelque rapport commun dans le mouvement d’impulsion des comètes : car, comme nous ne connaissons rien que par comparaison, dès que tout rapport nous manque et qu’aucune analogie ne se présente, toute lumière fuit, et non seulement notre raison, mais même notre imagination, se trouvent en défaut. Aussi m’étant abstenu ci-devant[1] de former des conjectures sur la cause du mouvement d’impulsion des comètes, j’ai cru devoir raisonner sur celle d’impulsion des planètes ; et j’ai mis en avant, non pas comme un fait réel et certain, mais seulement comme une chose possible, que la matière des planètes a été projetée hors du soleil par le choc d’une comète. Cette hypothèse est fondée sur ce qu’il n’y a dans la nature aucun corps en mouvement, sinon les comètes, qui puissent ou aient pu communiquer un aussi grand mouvement à d’aussi grandes masses, et en même temps sur ce que les comètes approchent quelquefois de si près du soleil qu’il est pour ainsi dire nécessaire que quelques-unes y tombent obliquement et en sillonnent la surface en chassant devant elles les matières mises en mouvement par leur choc.

Il en est de même de la cause qui a pu produire la chaleur du soleil : il m’a paru[2] qu’on peut la déduire des effets naturels, c’est-à-dire la trouver dans la constitution du système du monde car le soleil ayant à supporter tout le poids, toute l’action de la force pénétrante des vastes corps qui circulent autour de lui, et ayant à souffrir en même temps l’action rapide de cette espèce de frottement intérieur dans toutes les parties de sa masse, la matière qui le compose doit être dans l’état de la plus grande division ; elle a dû devenir et demeurer fluide, lumineuse et brûlante, en raison de cette pression et de ce frottement intérieur, toujours également subsistant. Les mouvements irréguliers des taches du soleil, aussi bien que leur apparition spontanée et leur disparition, démontrent assez que cet astre est liquide, et qu’il s’élève de temps en temps à sa surface des espèces de scories ou d’écumes, dont les unes nagent irrégulièrement sur cette matière en fusion, et dont quelques autres sont fixes pour un temps et disparaissent comme les premières lorsque l’action du feu les a de nouveau divisées. On sait que c’est par le moyen de quelques-unes de ces taches fixes qu’on a déterminé la durée de la rotation du soleil en vingt-cinq jours et demi.

Or, chaque comète et chaque planète forment une roue dont les rais sont

  1. Voyez l’article de la formation des planètes.
  2. Voyez l’article qui a pour titre : De la Nature, première vue.
  1. On considère aujourd’hui les comètes comme des nébuleuses se déplaçant dans l’espace et subissant de la part du soleil et des autres astres des actions susceptibles de modifier leur marche. [Note de Wikisource : Les comètes seraient plutôt des « embryons » de planètes avortées, produits par accrétion de poussières et de gaz lors de la contraction du nuage interstellaire à l’origine du système solaire, formés par-delà l’orbite de Neptune ou éjectés par l’influence des planètes géantes à la périphérie du système solaire.]