Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/216

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représentent les parties sexuelles de la femelle, seront les seules qui serviront de point d’appui aux molécules organiques qui proviennent de toutes les parties du corps du mâle, et cela, parce que ce sont les seules qui soient en effet différentes des autres. De là on pourrait conclure que l’enfant mâle est formé des molécules organiques du père pour les parties sexuelles, et des molécules organiques de la mère pour le reste du corps, et qu’au contraire la femelle ne tire de sa mère que le sexe, et qu’elle prend tout le reste de son père : les garçons devraient donc, à l’exception des parties du sexe, ressembler davantage à leur mère qu’à leur père, et les filles plus au père qu’à la mère ; cette conséquence, qui suit nécessairement de notre supposition, n’est peut-être pas assez conforme à l’expérience.

En considérant sous ce point de vue la génération par les sexes, nous en conclurons que ce doit être la manière de reproduction la plus ordinaire, comme elle l’est en effet. Les individus dont l’organisation est la plus complète, comme celle des animaux dont le corps fait un tout qui ne peut être ni séparé ni divisé, dont toutes les puissances se rapportent à un seul point et se combinent exactement, ne pourront se reproduire que par cette voie, parce qu’ils ne contiennent en effet que des parties qui sont toutes semblables entre elles, dont la réunion ne peut se faire qu’au moyen de quelques autres parties différentes fournies par un autre individu ; ceux dont l’organisation est moins parfaite, comme l’est celle des végétaux dont le corps fait un tout qui peut être divisé et séparé sans être détruit, pourront se reproduire par d’autres voies : 1o parce qu’ils contiennent des parties dissemblables, 2o parce que ces êtres n’ayant pas une forme aussi déterminée et aussi fixe que celle de l’animal, les parties peuvent suppléer les unes aux autres et se changer selon les circonstances, comme l’on voit les racines devenir des branches et pousser des feuilles lorsqu’on les expose à l’air, ce qui fait que la position et l’établissement local des molécules qui doivent former le petit individu se peuvent faire de plusieurs manières.

Il en sera de même des animaux dont l’organisation ne fait pas un tout bien déterminé, comme les polypes d’eau douce et les autres qui peuvent se reproduire par la division ; ces êtres organisés sont moins un seul animal que plusieurs corps organisés semblables, réunis sous une enveloppe commune, comme les arbres sont aussi composés de petits arbres semblables (voyez chapitre ii). Les pucerons, qui engendrent seuls, contiennent aussi des parties dissemblables, puisque après avoir produit d’autres pucerons, ils se changent en mouches qui ne produisent rien. Les limaçons se communiquent mutuellement ces parties dissemblables, et ensuite ils produisent tous les deux ; ainsi dans toutes les manières connues dont la génération s’opère, nous voyons que la réunion des molécules organiques qui doivent former la nouvelle production ne peut se faire que par le moyen de quelques autres parties différentes qui servent de point d’appui à ces molécules,