Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/254

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les envies qu’elles n’ont pu satisfaire ; cependant ne pourrait-on pas leur demander, avant la naissance de l’enfant, quelles ont été les envies qu’elles n’ont pu satisfaire, et quelles seront par conséquent les marques que leur enfant portera ? J’ai fait quelquefois cette question, et j’ai fâché les gens sans les avoir convaincus.

La durée de la grossesse est pour l’ordinaire d’environ neuf mois, c’est-à-dire de deux cent soixante et quatorze ou de deux cent soixante et quinze jours ; ce temps est cependant quelquefois plus long, et très souvent bien plus court ; on sait qu’il naît beaucoup d’enfants à sept et à huit mois ; on sait aussi qu’il en naît quelques-uns beaucoup plus tard qu’au neuvième mois ; mais, en général, les accouchements qui précèdent le terme de neuf mois sont plus communs que ceux qui le passent. Aussi on peut avancer que le plus grand nombre des accouchements qui n’arrivent pas entre le deux cent soixante et dixième jour et le deux cent quatre-vingtième, arrivent du deux cent soixantième au deux cent soixante et dixième, et ceux qui disent que ces accouchements ne doivent pas être regardés comme prématurés paraissent bien fondés ; selon ce calcul les temps ordinaires de l’accouchement naturel s’étendent à vingt jours, c’est-à-dire depuis huit mois et quatorze jours jusqu’à neuf mois et quatre jours.

On a fait une observation qui paraît prouver l’étendue de cette variation dans la durée des grossesses en général, et donner en même temps le moyen de la réduire à un terme fixe dans telle ou telle grossesse particulière. Quelques personnes prétendent avoir remarqué que l’accouchement arrivait après dix mois lunaires de vingt-sept jours chacun, ou neuf mois solaires de trente jours, au premier ou au second jour qui répondaient aux deux premiers jours auxquels l’écoulement périodique arrivait à la mère avant sa grossesse. Avec un peu d’attention l’on verra que le nombre de dix périodes de l’écoulement des règles peut, en effet, fixer le temps de l’accouchement à la fin du neuvième mois ou au commencement du dixième[1].

Il naît beaucoup d’enfants avant le deux cent soixantième jour, et quoique ces accouchements précèdent le terme ordinaire ce ne sont pas de fausses couches, parce que ces enfants vivent pour la plupart ; on dit ordinairement qu’ils sont nés à sept mois, ou à huit mois, mais il ne faut pas croire qu’ils naissent en effet précisément à sept mois ou à huit mois accomplis ; c’est indifféremment dans le courant du sixième, du septième, du huitième, et même dans le commencement du neuvième mois. Hippocrate dit clairement que les enfants de sept mois naissent dès le cent quatre-vingt-deuxième jour, ce qui fait précisément la moitié de l’année solaire.

  1. « Ad hanc normam matronæ prudentiores calculos suos subducentes (dùm singulis mensibus solitum menstrui fluxus diem in fastos referunt) spe raro excidunt ; verùm transactis decem lunæ curriculis, eodem die quo (absque prægnatione foret) menstrua iis profluerent, partum experiuntur ventrisque fructum colligunt. » (Harvey, de Generat., p. 262.