Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/472

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et qui approchent assez des singes à longue queue, qui comme eux ont des mains, mais dont le museau est beaucoup plus allongé et plus pointu, sont encore des animaux particuliers à l’ancien continent, et qui ne sont pas trouvés dans le nouveau. Ainsi tous les animaux de l’Afrique ou de l’Asie méridionale qu’on a désignés par le nom de singes ne se trouvent pas plus en Amérique que les éléphants, les rhinocéros ou les tigres. Plus on fera de recherches et de comparaisons exactes à ce sujet, plus on sera convaincu que les animaux des parties méridionales de chacun des continents n’existaient point dans l’autre, et que le petit nombre de ceux qu’on y trouve aujourd’hui ont été transportés par les hommes, comme la brebis de Guinée, qui a été portée au Brésil, le cochon d’Inde, qui au contraire a été porté du Brésil en Guinée, et peut-être encore quelques autres espèces de petits animaux, desquels le voisinage et le commerce de ces deux parties du monde ont favorisé le transport. Il y a environ cinq cents lieues de mer entre les côtes du Brésil et celles de la Guinée ; il y en a plus de deux mille des côtes du Pérou à celles des Indes orientales : tous ces animaux qui par leur nature ne peuvent supporter le climat du Nord, ceux mêmes qui pouvant le supporter ne peuvent produire dans ce même climat, sont donc confinés de deux ou trois côtés par des mers qu’ils ne peuvent traverser, et d’autre côté par des terres trop froides qu’ils ne peuvent habiter sans périr ; ainsi l’on doit cesser d’être étonné de ce fait général, qui d’abord paraît très singulier, et que personne avant nous n’avait même soupçonné, savoir qu’aucun des animaux de la zone torride dans l’un des continents ne s’est trouvé dans l’autre.