Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/74

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sciences, quelques anatomistes tournèrent leurs vues sur la génération, et Fabrice d’Aquapendente fut le premier qui s’avisa de faire des expériences et des observations suivies sur la fécondation et le développement des œufs de poule. Voici en substance le résultat de ses observations.

Il distingue deux parties dans la matrice de la poule, l’une supérieure et l’autre inférieure, et il appelle la partie supérieure l’ovaire : ce n’est proprement qu’un assemblage d’un très grand nombre de petits jaunes d’œufs de figure ronde, dont la grandeur varie depuis la grosseur d’un grain de moutarde jusqu’à celle d’une grosse noix ou d’une nèfle ; ces petits jaunes sont attachés les uns aux autres, ils forment un corps qui ressemble assez bien à une grappe de raisin, ils tiennent à un pédicule commun comme les grains tiennent à la grappe. Les plus petits de ces œufs sont blancs, et ils prennent de la couleur à mesure qu’ils grossissent.

Ayant examiné ces jaunes d’œufs après communication du coq avec la poule, il n’a pas aperçu de différence sensible, il n’a vu de semence du mâle dans aucune partie de ces œufs, il croit que tous les œufs, et l’ovaire lui-même, deviennent féconds par une émanation spiritueuse qui sort de la semence du mâle, et il dit que c’est afin que cet esprit fécondant se conserve mieux que la nature a placé à l’orifice externe de la vulve des oiseaux une espèce de voile ou de membrane qui permet, comme une valvule, l’entrée de cet esprit séminal dans les espèces d’oiseaux, comme les poules, où il n’y a point d’intromission, et celle du membre génital dans les espèces où il y a intromission, mais en même temps cette valvule, qui ne peut pas s’ouvrir de dedans en dehors, empêche que cette liqueur et l’esprit qu’elle contient ne puissent ressortir ou s’évaporer.

Lorsque l’œuf s’est détaché du pédicule commun, il descend peu à peu par un conduit tortueux dans la partie inférieure de la matrice ; ce conduit est rempli d’une liqueur assez semblable à celle du blanc d’œuf, et c’est aussi dans cette partie que les œufs commencent à s’envelopper de cette liqueur blanche, de la membrane qui la contient, des deux cordons (chalazæ) qui traversent le blanc et se joignent au jaune, et même de la coquille qui se forme la dernière en fort peu de temps, et seulement avant la ponte. Ces cordons, selon notre auteur, sont la partie de l’œuf qui est fécondée par l’esprit séminal du mâle, et c’est là où le fœtus commence à se corporifier ; l’œuf est non seulement la vraie matrice, c’est-à-dire le lieu de la formation du poulet, mais c’est de l’œuf que dépend aussi toute la génération ; l’œuf la produit comme agent, il y fournit comme matière, comme organe et comme instrument ; la matière des cordons est la substance de la formation, le blanc et le jaune sont la nourriture, et l’esprit séminal du mâle est la cause efficiente. Cet esprit communique à la matière des cordons d’abord une faculté altératrice, ensuite une qualité formatrice, et enfin une qualité augmentatrice, etc.