Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/75

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Les observations de Fabrice d’Aquapendente ne l’ont pas conduit, comme l’on voit, à une explication bien claire de la génération. Dans le même temps à peu près que cet anatomiste s’occupait à ces recherches, c’est-à-dire vers le milieu et la fin du xvie siècle, le fameux Aldrovande (voyez son Ornithologie) faisait aussi des observations sur les œufs, mais, comme dit fort bien Harvey (p. 43), il paraît avoir suivi l’autorité d’Aristote beaucoup plus que l’expérience ; les descriptions qu’il donne du poulet dans l’œuf ne sont point exactes. Volcher Coiter, l’un de ses disciples, réussit mieux que son maître, et Parisanus, médecin de Venise, ayant travaillé aussi sur la même matière, ils ont donné chacun une description du poulet dans l’œuf qu’Harvey préfère à toutes les autres.

Ce fameux anatomiste, auquel on est redevable d’avoir mis hors de doute la question de la circulation du sang, que quelques observateurs avaient à la vérité soupçonnée auparavant et même annoncée, a fait un traité fort étendu sur la génération. Il vivait au commencement et vers le milieu du dernier siècle, et il était médecin du roi d’Angleterre Charles Ier. Comme il fut obligé de suivre ce prince malheureux dans le temps de sa disgrâce, il perdit avec ses meubles et ses autres papiers ce qu’il avait fait sur la génération des insectes ; et il paraît qu’il a composé de mémoire ce qu’il nous a laissé sur la génération des oiseaux et des quadrupèdes. Je vais rendre compte de ses observations, de ses expériences et de son système.

Harvey prétend que l’homme et tous les animaux viennent d’un œuf[NdÉ 1],

  1. Harvey est, en effet, le premier qui ait affirmé l’existence de l’œuf de la femme.

    Pour rendre plus facile la lecture de toute la partie de l’œuvre de Buffon relative à la génération, il me paraît utile de donner ici quelques détails sur les organes et les éléments anatomiques qui servent à la génération, chez l’homme et les animaux supérieurs, les seuls dont s’occupe Buffon. Cela me dispensera de relever par la suite chacune des nombreuses erreurs que l’illustre naturaliste a commises et qu’il ne pouvait guère éviter, étant donnée l’ignorance qui régnait à son époque relativement aux questions qui sont l’objet de ce mémoire.

    Chez l’homme, comme chez tous les animaux vertébrés, ce qui caractérise essentiellement la femelle, c’est la faculté qu’elle possède de produire des œufs, tandis que le mâle produit des spermatozoïdes. Œufs et spermatozoïdes sont des cellules très simples. La fécondation consiste dans une fusion d’un ou plusieurs spermatozoïdes avec la substance d’un œuf. À la suite de cette fusion de la cellule mâle avec la cellule femelle, cette dernière se segmente pour produire l’embryon.

    Ce sont là les faits constants présentés pour tous les animaux supérieurs ; ce qui varie d’un groupe à l’autre, c’est l’organisation de l’œuf et des spermatozoïdes, et surtout celle des parties qui produisent ces cellules.

    Les cellules mâles, ou spermatozoïdes, sont produites, chez tous les animaux supérieurs et chez l’homme, par une paire de glandes tantôt logées dans l’abdomen, comme chez les oiseaux, les poissons et les reptiles ; tantôt situées au dehors et pendant entre les cuisses. Ces glandes sont connues sous le nom de testicules. Les spermatozoïdes s’y forment dans l’intérieur de tubes ou de culs-de-sac ; d’où ils passent dans des canaux dits déférents qui, chez l’homme, les transportent dans une paire de réservoirs situés dans l’abdomen, au voisinage du rectum, et connus sous le nom de vésicules séminales. Au moment du coït, les vésicules séminales expulsent, en se contractant, les spermatozoïdes qu’elles contiennent et qui sont projetés au