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Je venais de citer Dussieux, Henri Martin, Michelet, et, maintenant, j’entrais à pleines voiles dans le récit de Garneau, au cœur même de ces pages émues où l’historien raconte notre dernière et inutile victoire, celle de Carillon, et enfin, le désastre des Plaines d’Abraham qui, l’année suivante, amenait le drapeau britannique sur la citadelle de Québec.

Ma voix tremblait bien un peu en citant, à côté de grands historiens comme Martin et Michelet, notre populaire et bien-aimé Garneau, dont le nom, hélas ! était encore bien peu connu en France, à cette époque. Je sentais bien, sans avoir besoin de lever les yeux sur eux, que mon émotion gagnait et le professeur et mes condisciples qui m’écoutaient dans un silence avide, qui dévoraient cette page retrouvée de l’histoire de France, et qui sentaient l’humiliation et l’orgueil leur monter au front, au souvenir de ce qu’une poignée de héros abandonnés sans ressources, sans secours, sans appui, sans vivres et presque sans munitions, avaient pu accomplir pour elle sur une plage lointaine, et à l’idée que la France est toujours aimée, partout où elle a passé, n’importe où, malgré tout, malgré toutes ses fautes comme femme, parce qu’elle n’a jamais cessé d’être mère.

J’étais arrivé presque au terme de ma lecture lorsque hélas ! un écueil que je n’avais pas