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LE CURÉ LABELLE

m’y étais jeté tête baissée, les yeux fermés, avec une détermination effrayante, sans balancer et sans peser quoi que ce soit, et c’est fort heureux, car autrement je n’aurais jamais osé et je n’aurais pas eu la meilleure des femmes. Après avoir accompli ce préliminaire indispensable au sacrifice mutuel, et seulement alors, je m’élançai vers le Témiscamingue, d’où je revenais moins de huit jours après avec ce chef-d’œuvre aussi peu lu que généralement admiré qui s’appelle « l’Outaouais Supérieur. »


II


Pour tous les citoyens de Saint-Jérôme le curé était un père et un oracle, et cela tout naturellement, comme si ça allait de soi, comme si ça ne devait pas être autrement. Le ministère religieux proprement dit était rempli par les vicaires. Quant au curé, il ne pouvait pas être un pasteur. Obligé de s’absenter à tout moment, de parcourir le pays dans toutes les directions, il lui était impossible de rester avec son troupeau de fidèles ; cela l’eût empêché d’accomplir son œuvre. Or, le curé se considérait comme