Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/18

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envoyé une députation à l’honorable Hector, lui assurant leurs votes, s’il obtenait qu’ils pussent reprendre leur petit commerce d’autrefois. L’honorable « compagnon » le leur a promis. Pendant ce temps, les amis de H. Pelletier essaient de se remuer : ils ont eu un caucus vendredi soir et vont convoquer ces jours-ci une assemblée publique, sur laquelle ils comptent pour porter un grand coup.

Des assemblées publiques ! vous savez ce qui en est presque toujours résulté pour les libéraux. Presque toujours ils y ont remporté les triomphes de la parole, et séduits par les acclamations du peuple, ils s’endormaient sur leurs lauriers, attendant avec une dédaigneuse confiance la victoire des polls. Certes, il n’est pas difficile de parler mieux et surtout plus vrai que les orateurs panachés du gouvernement, et le peuple, tant qu’on ne s’adresse qu’à son bon sens et à ses instincts libres, accepte plus volontiers des vérités même dures que des phrases mielleuses dont il devine l’objet. Mais ce n’est pas tout d’avoir pour soi la vérité en face d’une population habituée à une grossière corruption politique. Les leçons des hustings sont vite oubliées, tandis que l’action incessante, matérielle, s’exerçant directement sur toutes les faiblesses, subjugue facilement l’individu isolé qui ne peut puiser, ni dans ses connaissances ni dans sa vertu, assez de force ou assez de raison pour résister aux embûches de l’intérêt. C’est par l’action que le parti conservateur nous a toujours vaincus, c’est par l’inaction que nous avons toujours succombé. Le découragement, en outre, s’empare bientôt de nous, parce que nous ne disposons pas d’autant de moyens que nos adversaires ; nous disons qu’il