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CHRONIQUES

tous les désirs, devinant tous les appétits. La semaine dernière elle tomba morte de fatigue ; on la crut perdue, elle reçut les derniers sacrements, et, deux jours après, sa voix retentissait de nouveau au milieu des tables étonnées et ravies.

Venez donc, venez donc à la Malbaie, habitants des villes ! Vous y trouverez ce que vous cherchez en vain dans les autres stations d’eau et vous y éviterez l’ennui, cette maladie incurable qui, presque partout ailleurs, s’empare du voyageur au bout d’une semaine. Je vous assure que vous aurez de quoi jouir et vous amuser pendant un mois. N’est-ce pas déjà énorme que de pouvoir être certain d’un mois de bonheur par année… ?


4 Août

Voici maintenant que la campagne se pare de toutes ses richesses et de toutes ses couleurs. Les champs de blé commencent à jaunir, le foin est mûr et tombe déjà sous la faulx, dont la longue lame en forme de croissant rase partout le sol ; les haricots, les petits pois se gonflent sous les chaudes ondées que suit de près l’embrasement du soleil donnant dans toute sa force ; les fruits des vergers revêtent leur enveloppe de velours ; partout, avec les nuances les plus variées, les jeunes moissons se répandent sur les champs comme des robes, comme des guirlandes, comme des bouquets ; des senteurs âcres et douces, pénétrantes et suaves, s’élèvent