Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/366

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bellissement de leur ville, et ils se bâtissent pour cela des palais qui, toutes proportions gardées, n’ont pas d’égaux dans le monde.

Ce qui étonne, c’est que cela se fasse dans une ville où l’accroissement de la population n’est nullement en rapport avec celui du commerce et de la richesse. On dirait de Montréal : « C’est une ville de millionnaires, » mais on la croirait habitée par 500,000 âmes ; elle a l’étendue, le déploiement d’une grande métropole, tandis que sa population ne dépasse pas celle d’une cité de quatrième ordre. Cent vingt mille âmes pour Montréal, c’est presque humiliant. Allons ! qu’est donc devenue notre race de patriarches ? Où sont-ils ces enfants qui se comptent par dizaines autour de chaque foyer ? Tudieu ! est-ce que nous dégénérons ? Pas encore : mais cela viendra vite ; car nous faisons pis, nous émigrons ; les plus forts partent, laissant derrière eux tous les rabougris et les vieux garçons comme moi dont on ne peut plus rien attendre, et qui s’éreintent à prouver qu’ils sont inutiles.