nalières, du cercle de leurs coteries, du rayon où s’étend la voix du prédicateur ; toutes leurs paroles sont mesurées comme si elles devaient aussitôt s’en faire elles-mêmes les délatrices ; elles n’oseraient même pas avoir des gestes et une figure à elles, elles ont la figure les unes des autres.
Oh ! soyez avec ces femmes muet comme la tombe, sourd comme une borne ; n’ayez pas de regard et ne pensez pas, car la pensée a son langage dans les traits.
Ces femmes ont fait leurs maris qui n’ont rien fait ; par elles notre société est maintenue dans une défiance continuelle et une couardise sans bornes ; elles l’ont mommifiée avant qu’elle fût un cadavre ; maintenant elle ne se sent vivre que par la peur, et non de ce qu’elle respire, car elle n’a pas d’air.
Mais continuons notre marche par le monde ; il y a bien des choses à voir sur notre petite planète qui est une des moins belles et des moins brillantes de l’espace, faite exprès pour l’homme.
Sur cette planète il y a des colonies, lesquelles représentent dans l’ordre politique ce que les nègres sont dans l’ordre social. La plupart d’entre elles ne restent colonies que tant qu’elles ne peuvent l’éviter ; elles savent que leur enfance n’est pas éternelle, elles attendent impatiemment le jour où elles pourront marcher sans appui, elles comprennent leurs destinées et cherchent à les atteindre ; quelques unes même essaient déjà leurs forces, comme Cuba ; d’autres grandissent comme l’Australie, à pas de géant, et voient venir le jour certain où elles franchiront sans violence la limite de la tutelle.
Mais d’autres ne voient rien, ne comprennent rien et reculent elles-mêmes de plus en plus l’heure de l’affranchissement, pleines d’effroi et d’incertitude.
On comprend que je veux parler avant tout du Canada.
Un spectacle bizarre se présente ici.
Presque tous les journaux canadiens cherchent à éloigner de nous l’idée d’indépendance ou d’annexion, par horreur des États-Unis, tandis que l’Angleterre elle-même, la mère-patrie, déclare par la voix de Bright, qu’elle veut suivre pas à pas l’Union Américaine et modifier ses institutions d’après son exemple, qu’elle la regarde aller dans la voie du progrès, tenter l’expérience, se réservant de la renouveler chez elle, et mettre son amour-propre national, sa gloire future à suivre, plus près que toutes les autres nations, les États-Unis qui montrent le chemin et donnent l’exemple à chacune d’elles.