Ce que je ne comprends pas, c’est que malgré la neuvaine de saint François-Xavier, malgré l’installation de sainte Irène et de saint Félix, chacun dans un autel de Notre-Dame, malgré l’arrivée à Rome de l’évêque Bourget, malgré les prières innombrables qui se disent depuis un mois dans tout le Canada, les tempêtes de neige redoublent de violence et menacent de nous ensevelir tout à fait avant que le printemps n’arrive.
Il faut que les pénitents et pénitentes n’aient pas confessé tous leurs péchés, et Dieu s’en venge en bloquant le Grand Tronc sur toutes les voies ferrées du Canada.
Je ne vois pas d’autre manière d’expliquer le déchaînement furieux des ouragans.
Sainte Irène et saint Félix sont deux gentils petits saints, bien cirés, bien pomponnés, bien astiqués ; ils ont chacun un trou dans la gorge et de jolies petites mains ; mais ils sont exigeants en diable.
Figurez-vous qu’ils ont fait dire à l’abbé Picard, dans la chaire de Notre-Dame, que ceux qui ne donneraient rien à la quête qui serait faite pour leur acheter une nouvelle parure, perdraient toutes les grâces de la neuvaine ! Cependant, ils sont depuis quinze jours l’objet d’une adoration perpétuelle. Je suis allé contempler de mes yeux attendris la dévotion touchante qu’on leur témoigne, et je n’aurais jamais cru qu’avec une si grande jeunesse, ils eussent un esprit d’exploitation si merveilleusement développé.
Quand on est saint, il est vrai, on se transforme à discrétion et l’on prend vite les habitudes du pays où l’on se trouve.