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leurs animaux aux commerçants de passage. On ne s’étonnera pas après cela si dans cette paroisse même si jeune, si peu avancée que tous les bras y seraient nécessaires à la culture, l’émigration aux États-Unis est néanmoins encore relativement considérable. Et comment en serait-il autrement ? Nos compatriotes sont aujourd’hui tellement nombreux dans les États de la Nouvelle Angleterre, notamment dans le New-Hampshire et le Massachusetts, qu’ils y ont formé d’importantes colonies, gardant leur autonomie propre, leur caractère national, leur physionomie distincte, leurs usages, leurs coutumes et, qu’en outre de tout cela, ils ont leurs propres églises, leurs couvents, leurs hôpitaux, en un mot, une autre province de Québec transportée aux États-Unis et pouvant remplacer avantageusement, sous bien des rapports, le Canada des aïeux.

Une jeune fille, que j’ai rencontrée sur mon chemin et qui était venue passer quelques semaines dans son endroit natal, qu’elle avait quitté tout enfant et où elle n’était pas revenue depuis dix-huit ans passés, me répondait, avec un haussement d’épaules très expressif, à certaines questions que je lui faisais sur le rapatriement : « Ah ! bien oui, il n’y a pas de danger ; je trouve donc ça misérable par ici ! On est si bien à Fall River ; là les Canadiens sont chez eux, ils vivent tous ensemble, ils peuplent une ville à eux seuls, La Flin,