Page:Buies - Lettres sur le Canada, étude sociale, vol 2, 1867.djvu/20

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sement, de concessions, de reculades, en même temps que grandissait le jésuitisme et que les intelligences s’assoupissaient. Ce n’est pas que pendant cette époque qui dure encore, il n’ait apparu de temps à autre quelques belles figures, quelques types saillants ;[1] mais le parti libéral n’avait plus de but ; son programme était répudié par le Pays, nouvel organe qui avait pris la place de l’Avenir en 1852 ; la désorganisation était dans ses rangs ; aucune idée qui rattachât les fractions isolées du libéralisme, et par suite aucun but commun, aucune concentration d’efforts.

C’est au milieu de ces événements, et à mesure que disparaissaient les principes pour faire place aux Québecquoises, que l’on vit tout-à-coup surgir de nouveau l’Avenir, mais non plus cette fois l’organe du parti libéral reconnu, mais de quelques hommes avancés, véritables pionniers du radicalisme, qui ne s’effrayaient pas de la ligue puissante du clergé avec toutes les ambitions serviles, mais qui voulaient aller droit à la masse, et la secouer de sa torpeur. Le nouveau journal apparaissait avec un programme plus large, mieux défini, plus fécond que le précédent. C’étaient encore des membres de l’Institut qui le fondaient, entr’autres, M. Blanchet, qui ne tarda pas à en devenir le rédacteur. Comme on le voit, l’histoire de l’Institut est celle du libéralisme en Canada depuis vingt ans. Jamais il n’a failli à sa mission, et bientôt on va le voir, au milieu des tempêtes soulevées autour de lui, rester inébranlable, quoique isolé, et, se maintenir intact, malgré le redoublement des persécutions.

Avant de continuer le récit des événements qui vont suivre, je désire rapporter tout au long le programme du second « Avenir » tel qu’il fut formulé en 1856.

1.o Abolition du prétendu gouvernement responsable. Gouverneur

  1. Je signalerai entre autres, avec un véritable plaisir, l’hon. A. A. Dorion, qui restera à jamais comme le type de l’homme intégré, du politique désintéressé, de l’esprit, juste et du caractère sans taches. Il a fait tout ce qu’il a pu pour rallier les tronçons épars du parti libéral, et s’opposer aux mesures iniques, aux dilapidations des torys canadiens, mais les circonstances plus fortes que lui l’ont dominé.

    Je citerai encore l’hon. L. A. Dessaules, le plus rude champion des idées libérales proscrites, le vigoureux polémiste qui, pendant trois ans, a joué le plus grand rôle dans la presse, et l’un des plus utiles dans la Législature. Je ne fais que le mentionner en passant, parce que bientôt nous allons le voir figurer dans les luttes de l’Institut avec le cagotisme et l’intolérance, et soutenir dans ses écrits pleins de sarcasme et de logique invincible, les droits de la raison outragée. C’est à lui que l’Institut doit en grande partie sa force et l’éclat dont il brille aujourd’hui.