Page:Buies - Sur le parcours du chemin de fer du Lac St-Jean, deuxième conférence, 1887.djvu/17

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 16 —

souffle n’agite, couvrait le sol durci. Je sortis, je marchai d’abord quelque temps au hasard, puis j’entrai dans l’usine pour voir travailler les machines qui réparent le matériel roulant ; je fis semblant d’y comprendre quelque chose, et resortant, je me dirigeai successivement vers plusieurs log-houses où je fis parler les colons, et surtout leurs tendres épouses qui, jusqu’au fond des bois, ont la langue plus déliée que le sexe qu’on appelle laid par pure antithèse. Partout j’entendis les mêmes plaintes contre le gouvernement ; pourquoi se plaignait-on de lui à ce point ? Je n’ai pas bien réussi à le comprendre, et ne le sais pas encore au juste, mais ce que je sais bien, c’est que nous sommes malheureusement plus d’une fois tombés sous des ministres qui ne comprenaient pas les dépenses utiles et profitables, qui ne savaient pas que dans un pays à peine habité comme le nôtre, l’affaire la plus importante, la dominante, celle à laquelle on doit sacrifier largement le plus de revenus possible, et surtout bien veiller à leur distribution, c’est la colonisation, article premier et qui devra être longtemps encore à l’ordre du jour de tous les programmes ministériels à venir. J’entendis encore plus d’une bouche demander avec instance l’établissement d’une scierie à la rivière à Pierre, car les pauvres colons de l’endroit sont obligés de faire venir leurs planches et leurs madriers de la Rivière Noire, ce qui leur coûte $7.00 par wagon pour un trajet seulement de six milles.

Après avoir beaucoup fait parler, je repris ma marche, j’errai dans toutes les directions, je pénétrai partout où je vis une ouverture devant moi, jusqu’à ce