Page:Bulletin de la Commission départementale des monuments historiques du Pas-de-Calais, tome 6, 1935.djvu/178

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« On battit une chapelle sur la petite place d’Arras, dans laquelle on déposa ce cierge enfermé dans un étui d’argent, et les ciriers de la ville en furent nommés les gardiens. A cette occasion il se forma une célèbre confrérie, composée de tout ce qu’il y avoit de mieux dans la ville, et les évêques mêmes s’y enrôloient. On trouva l’année dans laquelle ce cierge fut donné dans le mot CereVM. Tous les ans, le jour du dimanche dans l’octave du Saint Sacrement, il se chantoit le matin une messe solennelle dans la chapelle, pendant laquelle ce cierge étoit allumé, et l’après-midi, un cirier revêtu d’une aube et d’une tunique, ayant une couronne de fleurs sur la tête, portoit ce cierge sous un dais : il étoit précédé immédiatement d’une bande de violons qui jouoient toujours le même air, appelé l’air de la Sainte-Chandelle ; ceux-ci étoient précédés par des chars, des anges, des vierges montées sur des ânes, etc, etc.... Quoique le prédicateur qui prêchoit ce jour-là inculqua toujours à ses auditeurs que l’espèce de culte qu’on portoit à la Sainte-Chandelle étoit relatif à la Sainte Vierge, qu’on devoit remercier des grâces qu’on avoit reçues par son intercession et la prier pour en obtenir d’autres, les gens simples et surtout ceux de la campagne alloient servir, disoient-ils, la Sainte Candoule, et lui adressoient tout uniment leurs prières. Ce cierge étoit le jouet des impies et le sujet de plusieurs superstitions, qui consistoient à voir comment le cierge brûloit. Si la lumière en étoit vive, c’étoit le signe d’une moisson abondante ; on trembloit quand la lumière en étoit plus pâle, etc. Tout ceci bien considéré fait sembler étrange comment une cérémonie si bizarre s’est conservée pendant un siècle aussi éclairé que le nôtre et celui qui l’a précédé. En 1770, Monsieur Louis de Conzié, évêque d’Arras après s’être informé au sujet de cette procession qui étoit plus burlesque que pieuse, fit fermer la chapelle de la Sainte-Chandelle pendant toute l’octave du Saint Sacrement, deffendit de l’allumer dorénavant et de faire aucune procession, etc. ».

Ici Dom Wartel, qui avait rédigé sa chronique en 1786, ajoute après coup — et c’est la plus récente addition qu’il ait faite à son manuscrit : « Cette chapelle a été démolie en 1791 par ordre de la municipalité ».

P. 27, il dit du rôle de l’évêque Lambert : « Lambert étoit présent à ce don miraculeux, et il semble étonnant que la Sainte Vierge ait fait affront à l’évêque, en ne lui donnant pas ce cierge à lui-même, et en préférant les mains profanes de deux histrions aux mains sacrées de l’évêque  ».

Il nous donne (p. 32) le texte suivant de l’épitaphe de Lambert, dans la cathédrale, « à la droite du chœur…, sur un marbre enchâssé dans la muraille : »

Anno Domini MC.XV.XVI cal junii, obiit beatæ memoriæ Lambertus, hujus Attrebatensis sedis cardinalis épiscopus. Per hunc restituta est dignitas hujus episcopatus, quæ per multa tempora Cameracensi episcopo fuerat commendata. Huic episcopo et duobus jaculatoribus Itherio et Normanno beata Virgo in hac ecclesia apparuit, dans eis candelam per quam sanantur ardentes igne malo[1].

Dom Wartel n’est pas plus favorable au culte de saint Nazaire, (p. 127) : « Sous l’abbé Georges Bellot (1576-1587), Renault Pingrelem, prieur d’Aubigny, parla un jour en mauvaise part de l’abbé Bellot. Ayant ensuite appris qu’on avoit rapporté à son abbé le mal qu’il en avoit dit, il entra dans une telle crainte d’en être réprimandé qu’il en devint furieux et fou. On le fit conduire aux loges du village de St Nazaire[2] pour le guérir, mais il revint fou à l’abbaye et y mourut 1er de l’an 1586, deux ans après avoir perdu l’esprit ».

  1. Cf. Epigraphie, t. VII, p. 3.
  2. Ablain-St-Nazaire.