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avaient répandu dans Aix leurs doléances, accusant les Échevins de les maltraiter depuis qu’ils étaient allés à Nice sur l’ordre de l’Infant le bruit en était parvenu jusqu’à la cour de ce prince. Les édiles recevaient en même temps une lettre du maréchal de Maillebois, datée de San Salvadour, le 8 octobre, leur faisant part aussi des plaintes qu’il avait déjà reçues des comédiens.

Très effrayés de la tournure que prenait l’affaire il semble surtout que la crainte de l’effet produit à la cour de l’Infant les ait affolés les Échevins écrivent à diverses personnages pour se justifier à l’Intendant, au marquis de Mirepoix, à M. de Mauriac, commandant en second, au maréchal de Maillebois (1). Leur crainte se traduit enfin par la sentence fort sage qu’ils rendent le 26 octobre l’opéra sera représenté alternativement, une semaine les dimanche, jeudi et samedi, l’autre semaine les mardi, jeudi et samedi, et ainsi en continuant jusqu’à l’expiration (2). Cette décision ne donna pas cependant satisfaction aux comédiens. Ils en appelèrent au Parlement. Dans leur requête ils avançaient ce qui exaspéra les Échevins que la municipalité avait suscité la venue du directeur d’opéra pour les tracasser, et par ressentiment de leur séjour auprès de l’Infant à Nice. Les magistrats incriminés écrivirent, le 9 novembre, au marquis de Mirepoix

« Cette requête en renouvelant nos inquiétudes nous donne une preuve trop certaine de l’imposture, et nous ne pouvons nous empêcher de vous réitérer, Monseigneur, nos plaintes et nos très humbles instances pour nous faire la justice que mérite notre conduite nous omettons les discours peu mesurés et insolens qu’ils ont tenus publiquement contre nous en cette ville et dont nous avons pas osé les punir dans les circonstances où ils nous ont jetés, et mille tracasseries aussi dégoûtantes que multipliées, occasionnées par cette concurrence des spectacles. » (3). Ils demandaient ensuite au maréchal de les justifier auprès de l’Infant. Il s’agissait bien en réalité d’une manœuvre assez habile, mais déloyale, de la part des comédiens les lettres du comte de Rohan écrites aux Échevins, après le retour du carnaval de Nice, prouvent bien que leur voyage avait été favorisé par les édiles, et que ceux-ci ne leur en avaient gardé nulle rancœur.

(1) Toutes ces lettres sont enregistrées aux Arch. Mun., BB 271, fot. 147 sq., et BB 311, fol. )47v°.

(2) Arch. Mun. Marseille, FF Procédures de police, )745. (3) Arch. Mun. Marseille, BB 271, fol. 148.