Page:Bulletin de la société des historiens du théâtre, année 3, n°3-4.djvu/21

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lorsque nous pouvons le sentir, nous constatons qu’il est fort gros les « mots de gueule» ne manquent pas, les obscénités non plus l’action est souvent nulle, et se réduit à quelque nigauderie, vigoureusement assaisonnée de taloches, comme une entrée de clowns. Mais l’intérêt de publications semblables est justement de nous montrer ces formes embryonnaires du jeu dramatique. est difficile de bien comprendre le théâtre si l’on perd de vue ses origines les plus humbles. Les beauxesprits du XVtH** siècle rougissaient de leurs ancêtres les farceurs on sait ce qu’il en advint, jusqu’au jour où Beaumarchais. mais Beaumarchais, précisément, avait commencé par brocher des parades. Et puis il y a tout de même autre chose dans ces courtes facéties nous y voyons apparaître déjà quelques types, virtuellement riches, pour ainsi dire, et dont la vie sera longue l’écumeur de latin deviendra le docteur, en passant par l’écolier limousin le « corrigeur du Magnificat fournira lui aussi quelques traits de cuistrerie, et le « capitaine des sots fourrés de malice» est peut-être l’ancêtre du Capitan. Qui pourra dire si les Italiens ne nous rapportèrent pas, moins d’un siècle plus tard, quelques inventions joyeuses qu’ils devaient à nos compagnies de sots ? Les comédiens de i art étaient gens cultivés et prenaient leur bien où ils le trouvaient.

Non seulement certaines figures de ce répertoire sont dessinées d’un trait déjà net, encore qu un peu grêle, mais on voit aussi, de ci, de là, quelques morceaux d’ensemble qui ne manquent pas de qualité. Si bien que nous pouvons saisir le passage de la sotie à la farce, et que nous sommes avertis de ne point donner une trop grande importance aux distinctions précises que voudraient faire les théoriciens modernes la Farce du Pauvre Jouhan est bien une sotie, malgré son titre Pathelin, une farce, et le chef-d’oeuvre de la farce, est proposé, dans la Sotie des Coppieurs, à une bande de sots quant aux Vigilles Triboulet, elles s’intitulent « farce ou sotie » en réalité la différence consistait tout au plus peut-être dans la mise en scène et la manière de mener le jeu. Dans son Histoire du Théâtre profane au moyen âge, M. G. Cohen écrivait en )93), à propos des soties Nous n’en possédons point du XtV** siècle, et bien peu du xve. Grâce à l’édition du Recueil Trepperel, voici que cette lacune commence à se combler des textes nouveaux sont mis à la disposition des chercheurs les problèmes qu’ils posent ne seront pas résolus de si tôt, mais qu’importe ? L’essentiel est qu’ils soient posés, et ce nous est, répétons-le, une joie et une fierté de voir figurer dans la collection de notre société le beau travail qui ouvrira le débat.