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Page:Bulletin de la société des historiens du théâtre, année 3, n°3-4.djvu/33

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être vu ? Nos théâtres sont encore, et beaucoup trop, des écrins pour les bijoux du grand-monde et du demi-monde peut-être n’est-il pas mauvais à toutes sortes de point de vue, qu’on en revienne à la simplicité de l’hémicycle antique, et à donner plus de valeur à la scène qu’à à la salle.

Mais l’extérieur ? direz-vous. Méfiez-vous que votre plaisanterie sur l’usine-théâtre pourrait bien être plus près de la vérité qu’elle ne croit l’être. Vous croyez que les auteurs de ces murs nus et de ces immenses verrières « font abstraction de toute sentimentalité" ? Qui vous dit que, pour eux, la maison de leur labeur ce n’est pas quelque chose de beau, et qu’il ne soit pas beau pour un autre édifice de rappeler l’usine, cent fois plus beau que de rappeler les monuments du tsarisme détesté ?

« Architecture trop facile de boîte à savon ? C’est bientôt dit mais le procédé de construction employé et qui a d’incontestables avantages pratiques permet-il une décoration vraiment artistique ? Certaines affligeantes bâtisses de nos grands boulevards ne le démontrent pas, et M. B. n’y croit guère « Si on veut faire riche, on a recours aux revêtements en marbre par plaques, en fibro-ciment imitant le bois, qui cherchent l’illusion par le mensonge N’y a-t-il pas dès lors plus de probité artistique à renoncer, provisoirement, à faire autre chose qu’un bâtiment utilitaire, où du moins l’art dramatique sera bien servi ? L’intérêt historique de ce concours de Karkhov et des documents publiés par la librairie Morancé, ne serait-il pas de nous montrer un monument fort curieux où l’architecture théâtrale peut disposer d’une technique perfectionnée et féconde, mais qui n’a pas encore trouvé son esthétique ? Situation exactement inverse de celle que nous trouvons au XVIH~ siècle, de Soumet à Gabriel et à Louis, époque où de vrais, de grands artistes n’arrivent à construire que des théâtres médiocres, parce qu’ils ne disposaient que de moyens techniques insuffisants, pour ne pas dire, parfois, enfantins.