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avec lui ; et je trouvais qu’il était juste de faire servir son esprit à réparer une fortune que, d’après Squills, son idéalité et sa constructivité avaient si notablement diminuée. Je reconnais ici que je fus redevable d’une partie de mes succès à son génie irrégulier. L’exploration des mines supposées n’avait pas satisfait M. Bullion, et elles ne furent bien découvertes que quelques années plus tard. Mais Jack, convaincu de leur existence, avait acheté à son compte, et pour presque rien, des terres stériles qui se changèrent ensuite en une Golconde nouvelle, sous le nom euphonique de Mines de Tibbets. Ainsi s’était heureusement trouvée arrêtée la formation du dépôt de grog, et l’oncle Jack s’occupait alors des affaires de Port-Philippe. Profitant de ses conseils, je fis dans cette nouvelle colonie quelques timides et prudentes acquisitions que je revendis très-avantageusement.

Cependant il ne faut pas que j’oublie de dire brièvement quelle avait été, depuis mon départ d’Angleterre, la carrière ministérielle de M. Trévanion.

Ce raffinement de délicatesse et ces scrupules de conscience en matière politique, qui le caractérisaient lorsqu’il n’était encore que membre du parlement, et qui faisaient penser à ses amis comme à ses ennemis qu’il était sans capacité pour les affaires, tandis que réellement son esprit avait toutes les qualités qui font un bon administrateur, auraient peut-être fondé sa gloire comme ministre, s’il avait pu être ministre sans collègues ; si, debout et seul sur les hauteurs du pouvoir, il avait pu exposer clairement devant le monde l’exquise honnêteté de ses desseins et ses merveilleux talents d’homme d’État. Mais Trévanion ne put s’amalgamer avec d’autres, ni souscrire à la discipline d’un cabinet dont il n’était pas le chef, surtout dans une politique qui était tout à fait contraire à sa nature, dans une politique qui n’a pas été seulement celle d’un parti, mais qui s’est tellement imposée dans ces derniers temps à tous nos plus éminents hommes d’État, que ceux qui sont les plus indulgents pensent qu’elle est le résultat nécessaire du siècle et de l’esprit public : je parle de la politique d’expédients.

Je ne veux pas introduire dans ce livre les éléments irritants de la politique ; d’ailleurs, je ne suis pas assez versé dans cette matière. Tout ce que j’ai à dire, c’est que, bonne ou mauvaise, cette politique devait se trouver constamment en