Page:Bulwer-Lytton - Le Maître d’école assassin, 1893.djvu/42

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pèce humaine, risquer une action hardie quoique coupable, et par cette action conquérir le pouvoir qui me permettait de faire le bien ! Je me posai ainsi la question. C’est une terrible question : elle vous entraîne dans un labyrinthe de raisonnements, où l’âme peut s’enfoncer et se perdre à jamais.

Un jour Houseman me rencontra, accompagné d’un étranger qui venait d’arriver dans notre ville ; vous devinez déjà dans quel but ; son nom, du moins le nom qu’il s’était donné, était celui de Clarke. Faites attention désormais, je suis sur le point de m’expliquer franchement sur le caractère de cet homme, et sur sa destinée. Et pourtant vous êtes son fils. Je voudrais adoucir les nuances, mais il faut que je dise la vérité sur moi, et je ne dois pas altérer la vérité en parlant des autres lorsque je m’expose ainsi à me peindre encore plus noir que je ne suis. Houseman me rejoignit, me présenta ce personnage. Tout d’abord je sentis un frisson de répugnance me parcourir tout le corps, et pour quiconque eût vu l’individu, ce mouvement de répulsion se fût aisément expliqué. Son ensemble et ses traits exprimaient la réunion de tous les vices imaginables : on lisait sur son front, dans ses yeux, l’histoire de toute une vie passée dans la débauche sordide et la prodigalité. Sa conversation me répugnait au dernier point. Il exprimait les sentiments les plus bas, et il les appuyait de sentences qu’il donnait comme l’expression d’une sagacité supérieure, il ne faisait point difficulté d’aimer sa malhon-